LE DEVOIR D'ÉVANGÉLISER LES MUSULMANS

Un article du Père Yannick Bonnet dans l'Homme nouveau

L'homme nouveau - n° 1479 • Samedi 23 octobre 2010

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Le devoir d’évangéliser


Faut-il évangéliser les musulmans de France ? La réponse à cette question m’a été donnée voici quelques semaines par une Algérienne, devenue catholique depuis plusieurs années. Cette femme rayonne de joie d’avoir découvert la lumière du Christ, de se sentir dans le vrai au sein de l’Église catholique, d’avoir trouvé toutes les réponses aux questions qu’elle se posait plus ou moins clairement avant sa conversion. Pour elle, c’est une évidence que les Français auraient dû évangéliser l’Algérie dès leur arrivée et elle n’a qu’un désir c’est que l’on rattrape le temps perdu. Notre conversation n’était pas pour moi une vraie joie, car j’ai vécu dix ans en Algérie et j’ai au-dessus de moi trois générations de médecins militaires, qui ont passé des dizaines d’années en Algérie, en Tunisie et au Maroc. Ils ont soigné avec amour des centaines de musulmans et je me souviens d’avoir pu bénéficier de la reconnaissance d’anciens opérés de mon père, quand celui-ci participait à la campagne d’Italie.

L’islam, une perversion


En effet, après le débarquement anglo-américain du 8 novembre 1942 à Alger, les restrictions alimentaires ont été extrêmement sévères ce que beaucoup ignorent, et à plusieurs reprises, ma mère a vu arriver à la maison de sympathiques Arabes ou Kabyles, qui lui apportaient des vivres introuvables à Alger et provenant de leur « bled ». Dans ma famille, on aimait beaucoup les musulmans et c’est la raison pour laquelle on détestait l’islam. L’islam est une perversion, pire qu’une hérésie, de la foi envers le Dieu-Amour, éternel, vivant et vrai. Être pétri de cette conviction n’empêche absolument pas de respecter les musulmans et de dialoguer avec eux, mais dans la vérité, qui est une exigence de la vraie charité. Quand j’opérais dans l’émission de RCF, « Un prêtre vous répond », je me suis trouvé par trois fois en direct avec des musulmans au demeurant remarquablement courtois et respectueux : le dialogue s’est donc engagé aisément. J’ai bien senti chez eux le désir de comprendre ce qu’était notre foi et je n’ai pas caché les difficultés que je voyais dans les relations entre nos deux religions. Notre « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » est un concept étranger à l’islam, où le politique et le religieux sont difficilement séparables et cela dès sa fondation.
De même, les rapports entre foi et raison sont quasiment inexistants, sauf chez les disciples de l’Aga Khan, chiites ultra-minoritaires dans l’islam, et avec lesquels, j’ai eu l’occasion de le constater, on peut trouver des convergences aisées. Et puis, l’islam n’a pas de magistère, et comme le Coran contient tout et le contraire de tout, il ne faut pas s’étonner qu’il y ait en son sein des « courants » divergents. Comme le disent certains, autant d’imams autant d’islams !
Pour moi c’est clair, il y a un devoir grave pour la fille aînée de l’Église d’évangéliser les musulmans de France. La république franc-maçonne l’a empêché à une époque où cela aurait été fructueux. Malgré cela, des familles, kabyles essentiellement, se sont converties et j’ai eu, chez les jésuites, un excellent professeur de français kabyle. Près de soixante-dix ans plus tard je me souviens et de son patronyme et de sa compétence. Je suis donc très touché de savoir qu’il se crée des groupes de prière, qui demandent la conversion des musulmans de France, par exemple en invoquant Notre Dame de la Kabylie. Cela me rappelle les femmes musulmanes, que j’ai vues bien des fois venir dans la basilique de Notre-Dame d’Afrique présenter leurs bébés à « Madame l’Afrique » ! Parallèlement il existe aujourd’hui en France et en Algérie, un courant beaucoup plus important qu’on ne le croit, de musulmans qui ont gardé leurs distances avec l’islamisme et qui veulent connaître la religion de l’amour, celle du Dieu qui s’est fait homme pour que l’homme puisse devenir dieu en Jésus-Christ. N’en doutons pas, le sang des martyrs de Tibhirine sera semence de beaucoup de conversions et j’espère de tout mon coeur vivre assez vieux pour le voir. Abba, Père très doux, envoie ta grâce puissante sur les musulmans de France : rien ne peut faire plus de bien à la fille aînée de l’Église, rongée par l’apostasie.

Père Yannik BONNET