Combat provie - Un article de Dominique Morin

dans "Présent"

Combat provie : ce qui ne nous divise pas nous rend plus fort


Le succès incontestable de la Marche pour la Vie m’a inspiré quelques réflexions personnelles. Cette réussite a été rendue possible grâce aux diverses associations qui ont accepté de s’unir pour un rendez-vous de visibilité politique. Pourtant, certaines associations ou chapelles ont encore du mal à favoriser des liens avec d’autres qu’eux-mêmes.
La prière et le jeûne à l’intention de femmes en situation d’avorter et l’aide qui leur est apportée, l’information des citoyens sur l’avortement, parmi d’autres engagements, complètent indéniablement l’action politique souterraine ou publique en faveur du respect de la vie. Par la prière, nous demandons à Dieu de nous aider dans le combat pour défendre la dignité de chaque être humain appelé à le servir et l’honorer. Nous lui demandons aussi la conversion du cœur des promoteurs de l’avortement.
Pour cela, certains privilégient des pèlerinages et des rosaires dans les églises ou dans la rue et d’autres préfèrent l’adoration et le jeûne. La diversité spirituelle, dans la lumière de la vérité, étant plutôt une richesse, qu’est-ce qui empêche que toutes les communautés et paroisses invitent leurs membres à participer à des veillées pour la vie ou à telle prière publique ?
Pas la doctrine catholique ni la légitime action du laïcat chrétien dans la cité.
La cause de la défense de la vie est encore victime des préjugés humains de certains amis, cachés derrière des prétextes religieux ou moraux. Reconnaissons que les choses évoluent positivement et qu’un important clergé, de sensibilités diverses, était présent le 23 janvier à Paris. La tradition catholique favorisant un sain œcuménisme pour le bien commun, à plus forte raison l’union avec d’autres catholiques pour protéger la création divine dans son innocence sacrée ne devrait poser aucun problème.

« Les gens d’armes batailleront et Dieu donnera la victoire. » (Sainte Jeanne d’Arc.)

L’engagement politique est aussi nécessaire pour des chrétiens. Parmi les partisans de l’action politique, certains privilégient l’action d’influence et jugent stériles les manifestations. La marche de cette année rassemblant des dizaines de milliers de personnes dans une ambiance pacifique et jeune est incontestablement une réussite. Pourtant, avant de parvenir à un tel résultat, il aura fallu, durant de longues années, que quelques dizaines puis centaines de manifestants se dévouent avant de parvenir à convaincre les indécis de les rejoindre. Le petit ruisseau, devenu une grosse rivière, sera demain, nous l’espérons, un fleuve puissant qui contribuera à balayer la culture de mort de notre pays. Mais cela ne sera possible que si les divisions et les clivages dans nos rangs s’effacent devant le souci de tous de contribuer à l’unité.
La persévérance ingrate mais constante finit toujours par payer. Ceux qui militent dans l’ombre depuis trente ans le savent bien. L’intérêt d’une manifestation est d’être présent et visible par les citoyens et les politiques qui veulent leurs voix. Pourquoi opposer différentes formes d’action qui défendent toutes la même cause ? Cette marche est une démonstration annuelle de notre unité. La réticence qui existe encore chez certains, associations ou paroisses, à simplement faire savoir à leurs amis qu’ils peuvent venir s’ils le veulent à la marche pour la vie est incompréhensible. Pour paraphraser saint Paul, je dirais que la charité politique nous presse. Commençons par la pratiquer entre nous.
Le traitement du militantisme pro vie par les médias est honteusement malhonnête et malveillant. Oui, et alors ? La fécondité de notre action ne doit rien aux médias. Elle témoigne, elle est vue, elle peut toucher les cœurs et les consciences. Notre seule obligation concerne les moyens légitimes à mettre en œuvre. Des milliers de concitoyens peuvent voir chaque année que le respect de la vie compte pour des manifestants souvent jeunes, des familles, des incroyants. Sans notre présence, ce témoignage manquerait, même si le militant reste un serviteur inutile.
Rien ne nous oblige à nous soumettre au « magistère médiatique ». Peut-on croire que, sous la chape de plomb du mensonge, le cœur des hommes et des femmes changera sans recourir aux moyens que toutes les associations mettent en œuvre ?? Il me semble que certains confondent le plan spirituel et le plan temporel. Les uns idéalisent les moyens qui seraient jugés seuls acceptables à leurs yeux, se privant de moyens utiles et de la force de l’unité. D’autres semblent croire qu’il faudrait abandonner toute décision à la seule volonté divine, ce que n’a jamais dit la doctrine catholique.
Penser qu’une forme d’apostolat politique puisse être nulle et non avenue c’est manquer de foi dans les ressources que Dieu dispose en l’être humain pour lui permettre de chercher la vérité qui mène à Lui. Si le mal est si puissant, c’est en partie à cause des divisions ou de la tiédeur des gens de bien. Est-ce que nos préjugés humains, la peur du regard du monde sur nous, ou d’autres intérêts trop personnels, servent réellement la cause des enfants à naître ?
La culture de mort, par des campagnes d’intoxication médiatique, diabolise des associations et des membres ou sympathisants de partis « infréquentables ». Certains semblent accepter cette diabolisation pour, pensent-ils peut-être, ne pas subir ce discrédit ou obtenir quelque indulgence. En défendant la vie et la dignité humaine sans exception, on est déjà, pour les médias, du mauvais côté, celui des pestiférés, qu’on le veuille ou non, même si on donne des petites piques au voisin ou refuse tout contact avec un autre. Les partisans de la culture de mort ne font d’ailleurs pas de différence sinon en utilisant une dialectique mensongère pour essayer de nous affaiblir en nous divisant.
Et parfois, ça marche ! Leur véritable crainte, c’est la force que représenterait notre unité. Paraître fréquentable et bien policé, s’interdire des moyens supposés stériles voire illégitimes, refuser toute alliance ou sympathie affichée avec ceux qui sont diffamés, pour bénéficier de quelques invitations dans les médias ou obtenir tel statut, n’est-ce pas jouer sa partition aux dépens des autres associations ? A d’autres à qui l’apparence de certains manifestants sert de prétexte pour ne pas venir, je dirais simplement que chaque personne présente a raison d’être venue et que les absents ont tort… d’être absents. Les enfants à naître acceptent tous leurs amis comme ils sont car ils n’en ont pas tant que ça et ils sont même parfois divisés.
Alors, arrêtons de nous interdire de soutenir la marche ou une autre œuvre, de venir y participer ou d’aider ceux qui défendent la vie. Le vent tourne et les choix néfastes imposés à notre société produisant leurs fruits empoisonnés sous nos yeux, les consciences se réveillent.
Au nom du ministère de l’Intérieur, Alain Bauer (1) présentait en janvier les statistiques de la violence. Il a affirmé que seules les violences faites aux femmes, « chosifiées » selon lui, augmentaient de façon constante.
Contraception, avortement, pornographie, et tout le reste, il faudrait de l’aveuglement volontaire pour ne pas voir le désastre qu’ont engendré ces « droits » et « progrès. » Le combat pour la vie a vu une génération se déchirer, se battre et se décourager. Aujourd’hui, les faits confirment qu’il était précurseur. Avons-nous le droit de continuer à nous critiquer, même à mots voilés, et à ne regarder chez notre voisin que ses défauts, justifiant ainsi de lui refuser notre coopération et même notre sympathie ?
Pour imposer nos convictions aux politiques et en témoigner devant nos contemporains, nous avons besoin de signes d’unité pour devenir plus forts. Je dis unité, pas uniformité, car notre diversité est une richesse. Il suffirait, sans renoncer ni à son identité ni à sa forme d’action, de ne pas voir dans le voisin un concurrent ou un importun.
Amis des sans-amis auxquels on refuse la vie, amis des plus faibles des enfants innocents, protecteurs des pourchassés pour délit de faciès, nous devons aussi travailler à l’amitié entre nous. Pour rendre plus crédible notre engagement pour la vie. Démontrons-le en laissant de côté nos divergences pour soutenir toutes les entreprises pour la défense de la vie, cesser les critiques, favoriser des liens voire encourager une unité d’action. En contribuant à construire des ponts entre nous plutôt que des murs, nous aiderons notre cause commune à servir la vie avec plus de force. Pour l’honneur de Dieu et l’avenir de nos frères humains.

Dominique Morin - dominiquemorin.over-blog.com

(1) Ancien grand-maître du Grand Orient de France, obédience maçonnique ayant contribué activement à tous les projets en faveur de la culture de mort, d’où l’intérêt de son propos.

Article extrait du n° 7300 du samedi 5 mars 2011