Les 30 ans du pèlerinage de chrétienté et sa messe du 11 novembre

Un article de Rémi Fontaine

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Un article de Rémi Fontaine


« Les hommes d’Eglise modernes semblent presque avoir honte de la foi, c’est pourquoi ils se préoccupent de la défense de l’environnement, de la redistribution des biens et de l’aide au développement. Nous ne pouvons pas attendre qu’ils se ressaisissent. Nous devons aller davantage à l’extérieur, gagner une influence publique et rebâtir la Chrétienté. Avec mesure et charité. »
En cette année de la foi, qui correspond aussi aux 30 ans du « pèlerinage de chrétienté » de Paris à Chartres, ces paroles pourraient assez bien résumer l’histoire et l’action de cette aventure toujours actuelle lancée à la Pentecôte 1982 par le Centre Henri et André Charlier, dans l’esprit de Péguy.
Ce propos est en fait celui de l’abbé Niklaus Pfluger (premier assistant du Supérieur général de la FSSPX) dans un entretien publié le 13 octobre par l’Agence Dici. En l’occurrence et dans notre esprit, cette invitation ne se pose pas dialectiquement en termes de camps mais en termes de bien commun ecclésial, à l’écoute de Benoît XVI, pour que France et chrétienté ressuscitent ! Il concerne tous les fils de l’Eglise, laïcs et clercs, fiers de leur foi mais conscients de ce phénomène post-conciliaire que le pape a appelé « l’autosécularisation des clercs » dans une société de plus en plus laïciste où la plupart deviennent victimes d’un « relativisme subliminal » et de sa dictature subtile de la pensée, victimes en bref du totalitarisme sournois de la démocratie religieuse (cf. Présent du 3 octobre).
Même si le ton pastoral est en train de changer, le constat lucide de l’abbé Pluger n’est pas sans évoquer en effet la posture de nombreux évêques plongés dans la laïcité à la française qui parlent très peu de Dieu aux « gentils » du monde moderne et encore moins de la mission surnaturelle de l’Eglise. On se souvient du fameux rapport épiscopal de 1969 : « Au scandale ou à la risée de l’homme moderne, une partie, à vrai dire de plus en plus réduite de notre liturgie, continue à demander à Dieu ce que le paysan demande à l’engrais, un salut cosmique qui fait de Dieu le suppléant de nos insuffisances… » Vous avez dit : peur ou aliénation de la foi ?
Jean Madiran commentait justement : « Quand l’épiscopat oppose ainsi l’engrais (salutaire) aux Rogations (survivances païennes), comme si le cultivateur ne pouvait à la fois demander à Dieu ce que pourtant il attend de l’engrais, c’est par méconnaissance du rapport entre la cause première et les causes secondes, celles-ci n’excluant pas celle-là, ni l’inverse. »

Contre le leurre de leur laïcité

Mais ce genre de communiqué épiscopal n’a pas totalement disparu. Et quand, au dernier synode des évêques sur l’évangélisation, l’évêque de Poitiers, Mgr Pascal Wintzer (successeur de Mgr Rouet), s’en prend caricaturalement au concept de chrétienté, nous ne sommes pas sûr, par exemple, qu’il ne soit pas victime d’une méconnaissance analogue sur les bons rapports du temporel et du spirituel, du naturel et du surnaturel. « Rêver d’un retour de la chrétienté, dit-il, est un leurre, une illusion, et repose sur la sacralisation d’une forme historique de la présence de l’Eglise catholique. »
Comme si un nouveau mode de chrétienté ne pouvait plus surgir demain, sous l’effet d’une nouvelle évangélisation, dans une même autonomie et néanmoins (sub)ordination du temporel par rapport au spirituel. Comme si la « contre-culture » que préconise aujourd’hui Benoît XVI n’impliquait pas aussi et déjà ce lien « sacralisé » dans des micro-chrétientés agissant comme anti-corps de survie et peut-être de résurrection dans la dissociété et la culture de mort du monde laïciste. Comme si, enfin, le rêve de laïcité positive ou de catholicité ouverte à cette culture panthéonesque du mensonge n’était pas, pour le coup, « un leurre, une illusion » reposant sur cette désacralisation qui implique la décléricalisation, la laïcisation historique des clercs catholiques au service d’un sinistre MASDU (Mouvement d’animation spirituelle de la démocratie universelle)…
C’est envers et contre cela qu’on ne peut qu’encourager à soutenir l’œuvre de Notre-Dame de Chrétienté et à venir à sa messe anniversaire du 11 novembre : à 15 h 00, en l‘église Saint-François-Xavier (Paris 7e). Voici des extraits de son invitation :

En cette fête de Saint-Martin, en ce jour de souvenir et d’hommage pour tous ceux qui sont morts pour la France, Mgr Marc Aillet (évêque de Bayonne, Lescar et Oloron) célébrera la Messe pour notre Patrie, afin qu’elle retrouve le chemin de sa vocation de fille aînée de l’Eglise. Vous êtes tous invités à vous associer à cette messe pour la France, en y participant ou par la prière. Pour la France, dont le sort nous préoccupe particulièrement, tant nous la voyons s’écarter de plus en plus de la “Chrétienté”, entendue comme la réalisation, dans la vie de la cité, de la royauté du Christ sur toute la création et, en particulier, sur les sociétés humaines.
Or, promouvoir la Chrétienté est l’objectif de notre association, comme le précisent nos statuts, tandis que le pèlerinage n’est qu’un moyen mis au service de cet idéal. C’est la raison pour laquelle notre pèlerinage doit être missionnaire, car pour refaire une France chrétienne, il faudra des héros et des saints.
L’occasion pour tous les pèlerins de manifester, avec un évêque français qui sait rappeler avec clarté la doctrine catholique, notre attachement à l’Eglise et notre rejet des lois destructrices de la vie (avortement, bio-éthique) et des autres projets de négation de la loi naturelle en préparation (dénaturation du mariage qui ne peut être qu’alliance entre un homme et une femme, lois sur l’euthanasie).
A un moment où la définition naturelle de la Famille est gravement remise en cause, au risque de détruire le cœur de notre civilisation, cette messe sera un important témoignage en vue du Vrai, du Bien et du Beau.
A cette occasion, nous ne manquerons pas de remercier le Ciel pour toutes ces grâces reçues, ces conversions et ces vocations nées sur la route de Chartres, que parcourent à pied, chaque année, quelque dix mille pèlerins.

REMI FONTAINE
Article extrait du n° 7726 du quotidien "Présent" du samedi 10 novembre 2012