"Dans le monde où Dieu est présent, l'amour n'a pas de limites. Dans le monde de l'avortement, c'est à la vie qu'on met des limites".

Le témoignage de Norma McCorvey, rappelée à Dieu le 18 février 2017. Editorial de la Mère abbesse de l'abbaye Notre-Dame de l'Annonciation de la Font de Pertus

20170611FontdePertus.jpgNous avons tous des amis que nous n'avons pourtant jamais vus : notre ange gardien, notre saint patron, tel saint ou tel grand homme devenu pour nous un véritable frère . . .
J'aimerais vous parler d'une telle amie, Norma McCorvey, rappelée à Dieu le 18 février dernier. J'ai fait sa connaissance récemment, en lisant son récit autobiographique (note 1). Vous-mêmes connaissez peut-être Norma depuis longtemps, sous son pseudonyme de Jane Roe? En effet, c'est sous ce nom qu'à 25 ans, Norma McCorvey est devenue le prétexte de l'arrêt Roe contre Wade (note 2) de la Cour suprême des États-Unis, qui légalisa l'avortement en 1973. Ensuite, pendant plus de vingt ans, Norma eut à cœur de défendre " les droits des femmes ".
Comment cette Américaine, d'abord emblème de l'avortement dans son pays, y figure-t-elle maintenant comme l'icône du combat pour la vie ? Le titre original de son autobiographie, Won by Love, "Gagnée par l'Amour", nous l'apprend. "Après avoir travaillé pendant des années dans un chaudron de haine, de querelles, d'amertume et de ressentiment, j'ai été conquise par un peuple d'amour. Cela faisait partie de leur amour de me dire que j'étais pécheresse, que l'avortement était une offense à Dieu (...). Mais c'était aussi un amour qui me montrait qu'il y avait une solution, une chance de connaître le pardon, la grâce et la miséricorde. J'ai été conquise par l'amour". Jusque-là, instrumentalisée par le mouvement pro­ avortement, Norma avait compté pour rien. Chez les chrétiens pro­-vie, elle découvrit que la personne de Norma McCorvey comptait pour eux, parce qu'elle comptait pour Dieu. Malgré son lourd passé, Quelqu'un l'aimait pour de bon : Jésus.
Il est extraordinaire de découvrir les chemins et la puissance de la grâce dans une âme. Le récit de Norma nous introduit avec une grande sobriété dans le monde des souffrances - pour les mamans comme pour les bébés - de l'avortement. Il nous montre la "stratégie " des chrétiens qui s'y opposent : un amour authentique et courageux, alliant bonté et vérité. Jamais Norma McCorvey, pauvre et égarée, à qui l'on avait menti à l'envi, n'avait été aimée ainsi. Elle sut faire la différence. La joie des chrétiens bouleversa aussi Norma, par contraste avec la tristesse des personnes qui travaillaient avec elle à la clinique des avortements. La force lumineuse de la Parole de Dieu fit le reste.
Baptisée en août 1995 par un pasteur évangélique, Norma entra dans l'Église catholique trois ans plus tard. Après sa conversion, six autres personnes suivirent Norma en quittant la clinique d'avortement - trois d'entre elles sont devenues chrétiennes. Il n'est pas rare que Dieu transforme en fervents défenseurs de la vie des personnes ayant d'abord œuvré contre elle. N'excelle-t-il pas à tirer le bien du mal ?
De son baptême à sa mort, Norma McCorvey combattit sans relâche l'avortement et œuvra pour la vie, afin de réparer son passé. Sa conclusion nous intéresse : "Je me suis rendu compte que dans ce monde où Dieu est présent, l'amour n'a pas de limites. Dans le monde de l'avortement, c'est à la vie qu'on met des limites : il n'y a jamais assez d'amour ... jamais assez de temps ... jamais assez d'argent. .. jamais assez de place à la maison. Mais dans le monde de Dieu, l'amour grandit, il ne rapetisse pas. Dans le monde de Dieu, le temps devient éternel ; nous préparons nos enfants pour un monde qui n'aura pas de fin. Dans le monde de Dieu, les factures devront toujours être payées, mais nous n'aurons jamais à affronter nos obligations sans la foi. (...) J'ai maintenant un but dans la vie qui est plus grand que moi-même. Au lieu de me battre pour la mort, je me bats pour la vie. Au lieu de boire de la bière par pichets entiers, je m'abreuve de l'Esprit de Dieu et il ne me semble jamais en avoir assez."
Les vacances approchent. Prenez le temps de lire, chers amis. L'histoire vraie de Norma McCorvey vous passionnera. Voyez comment s'achève son témoignage : "J'ai confiance qu'un jour viendra où l'avortement légal ne sera plus qu'un douloureux souvenir, tout comme le jour est arrivé dans ma vie où les maux dans lesquels j'étais empêtrée ne sont plus qu'un douloureux souvenir. Il ne se passe pas un jour sans que je remercie Dieu pour ces hommes et ces femmes qui, par leurs contacts personnels avec moi ou simplement par leurs prières, m'ont aidée dans mon itinéraire. Sa miséricorde est sans limites, Son pouvoir est infini et Sa promesse de Vie ne nous décevra pas. Qu'Il soit loué!"

Sœur Placide o. s. b., abbesse

note 1 : Norma McCorvey, L'affaire jane Roe, éditions de L'Homme Nouveau, 2008, 366 pages.
note 2 : La Cour suprême donna raison à Jane Roe contre Henry Wade, procureur de district de l'État du Texas, qui défendait les lois du Texas réprimant l 'avortement.