Les 7 péchés capitaux : 1er volet

« Auras-tu l'oeil mauvais parce que moi je suis bon ? »

L'ENVIE.

Vous savez le sens spirituel de cette parabole. Mais aujourd'hui, pour ouvrir la série des 7 péchés capitaux, arrêtons-nous au sens moral. « Auras-tu l'oeil mauvais parce que moi je suis bon  » ?  C'est le reproche du maître de la vigne à l'ouvrier de la première heure dans l'Evangile de ce dimanche. C'est... l'envie démasquée. C'est cela, l'envie, la jalousie ; avoir l'oeil mauvais sur un bienfait de Dieu ou d'autrui.

« Jaloux, moi,... jamais » ?

En fait, c'est un défaut très « démocratique »... Nous avons tous la triste faculté d'être jaloux ; soit par penchant (ce qui n'est pas encore une faute), soit en acte. Remarquons par exemple la réaction des apôtres. Il leur est promis de siéger avec le Christ dans son Royaume, et s'ensuit aussitôt la première querelle de préséance. St Pierre, invité à suivre le Christ ressuscité, s'inquiète... de savoir ce qui est prévu pour St Jean..

« Les envieux mourront, mais non jamais l’envie ». Il y a une très longue procession des envieux dans l’histoire des anges et des hommes. Evitons d'y prendre place, tâchons d'en sortir.

D'abord, qu'est-ce que l'envie, et la jalousie?

L’envie ; la tristesse de l'avoir… « Qu'est-ce que les autres ont reçu? » ; Caïn jalouse le sacrifice d’Abel, et l’agrément divin. Pour nous, ce peut être, selon les âges et situations : un jouet - une attention - un diplôme ou un grade - une place, une responsabilité, un pouvoir - un succès - un charme - un niveau de vie - des relations, une amitié - une vertu.

La jalousie ; la tristesse de l'être... « Qu'est-ce que sont les autres ? » Caïn retourne son envie contre Abel-même.

Quels sont les « indices », les « signaux » de l'envie ?

  • Tristesse systématique : Pour quoi ? pour tout bien d’autrui. Ecoutez la jalousie du petit enfant; « ce n’est pas juste ». Ecoutez celle de l'adulte… Plus discrète, elle passe éventuellement par un silence affecté, une froide indifférence.
  • Aigreur, amertume : jamais de félicitations, d’encouragements, de compliments aux autres.
  • Bouffée de joie malsaine… devant le mal d’autrui. « Bien fait ! ».
  • Critique lourde, longue : de tout revers, maladresse, échec. « Prends ça ».
  • Destruction verbale, physique : la jalousie construit peu, et détruit beaucoup. Elle n'édifie pas, mais scandalise. Voyez la reine jalouse d’être « la plus belle », qui détruit même sa propre beauté, pour se débarrasser de sa rivale Blanche Neige…
  • Honte : on nie, on dissimule. On se rassure. « Jaloux ? Moi ? Jamais ! J'ai passé l'âge...»
  • Egocentrisme et captation : on ne s’occupe pas (assez) de moi, même un instant, même pour une bonne raison? Insupportable. Je suis pourtant aimé en particulier, par Dieu, par le prochain même? Insuffisant. Je dois être premier, et seul aimé. La jalousie asphyxie l’amour et l’amitié. Elle transforme l'attention et la confiance en soupçon et possessivité. Le jaloux voit la vie et le monde en forme de piédestal, non de podium. Quelle différence ? Sur un piédestal, il n'y a qu'une seule place ; la sienne, évidemment.
  • Agitation car seul le malheur des autres le repose. Seul l’entourage qui « vaut moins que lui » le met à l'aise.

Est-ce un péché capital ?

Oui... Il commande et explique bien d'autres fautes

  • contre le prochain… De la jalousie, on passe à la colère, puis la vengeance et la destruction. « Non, je ne puis souffrir un bonheur qui m’outrage...». Division, esprit de parti... car la jalousie veut rallier à sa cause... Elle se cherche des complices contre une personne, une œuvre. Devant témoins, à plusieurs, c’est plus drôle.
  • Contre Dieu : ingratitude, tristesse, murmure, reproche envers la Providence. L'envieux oublie ou omet facilement de rendre grâce.
  • Contre soi-même : ressentiment, amertume, mépris injuste, haine de soi. La Sainte Ecriture parle du grincement de dents des impies, sur terre et en enfer. Elle évoque également l'âme rétrécie ou desséchée par l'envie. « De l'amour j'ai toutes les fureurs (...) Que fais-je ? où ma raison se va-t-elle égarer ? Moi jalouse ! »

Quels sont les moyens d'en finir ?

  • D'abord l'examen de conscience, courageux, lucide sur ce point... (s')avouer ce défaut… et aussi les fautes, les actes, les chutes.
  • La méditation sur Dieu, c'est sérieux. Combien nous connaissons peu celui que nous appelons « le Bon Dieu ». Que savons-nous de Lui? L'oeil mauvais se purifie pourtant en se tournant de ce côté-là dans la foi. Dieu est infiniment bon en Lui. Il est ensuite source de tout bienfait hors de Lui. En nous, dans le prochain. N'ayons pas le « syndrome de l'entonnoir » ; ne réduisons pas les bontés de Dieu à nous seuls, nous ne pouvons les recevoir et les épanouir seuls. La jalousie sèche et rétrécit. La charité puisée en Dieu irrigueimprègnedilate dans le bien.
  • Chercher, voir, dire le bien vrai ; chez soi, et chez les autres! Tous les jours! Vous ne le voyez pas (bien)? Faites-vous aider par le jugement des « meilleurs » qui vous entourent ; supérieurs, famille, amis, ... et même subordonnés !
  • Rendre grâce. Emerveillement et gratitude ne vont pas de soi, il faut les entretenir et … les dire à Dieu et aux autres! « Bravo, merci, c'est bien... » sont des contrepoids à la jalousie.
  • Accepter aussi nos manques, nos limites. « Quels sont-ils ? En suis-je responsable, coupable... ou pas ? Puis-je, et dois-je changer sur ce point ? »
  • Notre plus grand bien est le bien commun. Donc tout bonheur du prochain augmente le vôtre. Tout progrès du prochain stimule le vôtre. Toute peine du prochain appelle votre compassion. Toute chute du prochain grandit votre humilité.
  • Eviter la jalousie aux autres. Pas d’acception de personnes, d’injustice, d’amour mal ordonné dans l'exercice des responsabilités. Il faut user de justice, de charité, de discrétion, dans la manière de faire du bien. Alors les qualités, talents, vertus éclairent le prochain, sans lui faire de l’ombre. Ils édifient, poussent au bien – sans détruire ou rabaisser.
  • Imiter la joie des saints : St Jean Baptiste est brillant, admiré, exposé, talentueux. Puis retiré, laissé par ses disciples, « doublé » par Notre Seigneur, et même « mis à l'ombre ». ses quelques fidèles sont jaloux du Christ. « Il est l'époux; l'ami de l'époux, qui se tient là et qui l'entend, éprouve une grande joie à cause de la voix de l'époux: cette joie, qui est la mienne, est parfaite. Il faut qu'il croisse, et que je diminue».