Solennité de la fête de Sainte Jeanne d'Arc

Bien allante et vaillante et sans étourderie,

Bien venante et plaisante et sans coquetterie,

Bien disante et parlante et sans bavarderie.

 

La fille la plus sainte après la Sainte Vierge

La fille de Lorraine à nulle autre pareille

La sainte la plus grande après Sainte Marie.

 

C’est vous que le poète a chanté, o Ste Jeanne

C’est vous que chante l’Eglise en ce jour !

 

Votre temps était-il meilleur que le nôtre ? Il a aussi ses lumières et ses ombres…

Vous êtes engagée dans la réalité dramatique de l’Eglise et du monde de votre temps. Un pape, deux antipapes… Une guerre fratricide, une guerre civile, le plus grand mal qui puisse déchirer une patrie charnelle ; la guerre de 100 ans.

Vos 2 procès de condamnation et de réhabilitation nous font connaitre votre vie, votre Passion, votre âme. Et je voudrais en rappeler quelques traits.

 

Votre piété

Elle est toute simple, incarnée dans l’invocation des noms de Jésus et Marie, que vous inscrivez sur votre anneau et votre étendard. JESUS ! Ce sera votre dernier mot, votre ultime prière à Rouen, sur le bûcher où votre âme s’envole à la rencontre du Seigneur. Cette piété, douceur de la foi, s’enracine dans la Messe quotidienne, la confession et la communion fréquente, la prière silencieuse devant l’image du Crucifié et de la Vierge Marie.

 

Votre parler

Il vient du profond sens de la foi et de l'Eglise. Le sensus fidei, « cette prompte détermination de l'âme qui devance le raisonnement et comme par intuition produit son acte avec une sûreté stupéfiante».

Et tout cela avec un je ne sais quoi de finesse, de bon sens qui vous vient du St Esprit, père des pauvres. Il déploie en vous ses dons de science, d'intelligence, de conseil. « Dans le jugement, on reconnaîtra ma finesse, devant les puissants j’exciterai l’admiration, et les princes me regarderont avec étonnement : si je me tais, ils m’attendront ; si je parle, ils prêteront l’oreille ; si je prolonge mon discours, ils se mettront la main sur la bouche».

 

Votre charité

Elle est cordiale, affectueuse et efficace tout en même temps. De votre premier à votre dernier âge, votre compassion adoucit la grande pitié des corps et des âmes, la grande pitié du Royaume de France.

Cette charité est bien ordonnée ; hier comme aujourd’hui, Dieu aime les anglais (et les autres) chez eux.

Cette charité est universelle et sans limite ; vous pleurez tous les soldats tombés dans les luttes de la terre. Vous exhortez à une solution pacifique et juste, jusqu’au bout.

 

Votre pureté

Elle est radicale. A l’appel du Seigneur, vous répondez par le vœu de virginité consacrée. Un soudard, un de ces rudes hommes de guerre, dira de vous ; « Jamais en sa présence il ne m’est arrivé de penser à mal».

Votre pureté est une transparence d’âme à la grâce divine. Elle est reflétée dans la transparence, la netteté des pensées, des affections, des désirs.

Pureté incarnée, non pruderie ou pudibonderie. C’est quelque chose d’héroïque, de clair, de frais, comme une source, un rire d’enfant. C’est quelque chose encore de subtil, de délicat comme votre âme. Vous pleurez et frémissez en voyant couler le sang de la Patrie, le sang français.

 

Votre engagement

Il est total. Il intègre en juste place, en bon équilibre, le spirituel et le temporel, la mystique et la politique. Sans séparation ni confusion, mais dans la distinction et la subordination. «La communauté chrétienne tend inexorablement à générer une civilisation».

A l’instar d’un grand penseur, vous jugez que le désespoir est la plus grande sottise en politique. A l’instar de la pensée constante de l’Eglise, vous jugez que la piété n’excuse pas l’égoïsme, la lâcheté, la mesquinerie. Votre Dieu est grand, Il agrandit les âmes, il pousse aux grandes choses. Vous êtes magnanime, jusqu’au milieu des calculateurs, des gagne petits, des mesquins.

Vous aimez la paix, mais vous consentez à la guerre juste. Vous menez la guerre juste parce que vous voulez maintenir et préserver la paix.

 

Votre Passion

Vous aimez le Seigneur qui vous aime, et cette amitié va jusqu’à l’ultime conformité. A la Passion du Seigneur, vous ajoutez votre Passion. Vous complétez en vous ce qui manque aux souffrances du Christ pour son Corps mystique qui est l’Eglise.

Votre procès et votre jugement sont la confrontation entre la grandeur de hiérarchie et la grandeur de sainteté. Heureusement, et pour l’honneur de l’Eglise, il y aura ensuite réhabilitation. Et en attendant, le Saint Esprit se fait votre avocat, votre défenseur. A ce très doux Dieu, vous demandez de quoi répondre aux piètres juges et docteurs égarés dans les querelles politiciennes.

 

Générosité et grandeur d’âme

« Va, fille au grand cœur ! », disaient justement vos voix. En vous sont réunies détermination et abandon.

Pour ce qui est du service de Dieu ; « Maintenant plutôt que plus tard, aujourd’hui plutôt que demain ! »

Et tout en même temps, vous affirmez « Je m’en remets à Dieu mon Créateur, je l’aime de tout mon cœur ».

 

Vous nous invitez bellement à un haut degré de la vie chrétienne. Une sainteté « au naturel ». Puisse votre exemple susciter un nouveau féminisme, mieux inspiré que le précédent !

 

O Jeanne, qu’on a raison de vous aimer, de vous prier, de vous imiter !

Gloria Jerusalem… vous êtes la gloire de la Jérusalem nouvelle, Eglise de la terre et du ciel.

Laetitia Israel… Vous êtes la joie de l’Israël nouveau, l’Eglise catholique qui en ce jour vous prie et vous chante.

Honorificentia populi nostri… Vous êtes l’honneur de notre peuple, ce peuple spirituel nouveau que le Christ s’est acquis au prix de son sang, et aussi ce peuple de France.

 

Abbé Garnier - 12 Mai 2019