Lundi 21 juin 2021

L’abbé Aulagnier, un géant de la Tradition

« L’abbé Aulagnier, un géant de la Tradition »

par Jacques-Régis du Cray

Monde et Vie, 4 juin 2021, p. 38-39

 

Elle résonnait sur le parvis de Notre-Dame de Chartres ou au pied du Sacré-Cœur de Montmartre. Elle présidait aux manifestations derrière le Louvre et devant les églises pour qu’on les lui ouvre. Cette voix de stentor qui enthousiasmait les fidèles traditionalistes dans les années 1980, c’était celle de l’abbé Paul Aulagnier. « Rendez-nous la messe ! Rendez-nous la messe de toujours ! » s’écriait-il. Cette voix représentait un peu celle des catholiques de France, errant sans feu ni lieu, cherchant des pasteurs leur montrant la route du Ciel, réclamant la manne de la foi dans le désert conciliaire. À la fin des années 1960, elle a interpellé de façon tellement convaincante Mgr Marcel Lefebvre que ce dernier s’est résolu, à l’âge de la retraite, à fonder des maisons pour sauver la messe et le sacerdoce catholique. Ce dernier entendit, à travers la fougue de cet étudiant du séminaire français de Rome un véritable appel qui correspondait à ses intuitions, à ce qu’il avait pressenti alors qu’il était encore archevêque de Dakar. Cette voix de l’abbé Aulagnier, tantôt paisible, au moment de la prière qu’il récitait au pèlerinage de sainte Thérèse, tantôt tonitruante lorsqu’il battait le pavé en l’honneur de sainte Jeanne d’Arc, s’est éteinte ce 6 mai 2021, au cœur de cette terre de France qu’il a tant aimée et tant sillonnée.

Revenons quelques années en arrière. Nous sommes à l’automne 1977. Le téléphone sonne au prieuré du Pointet, dans l’Allier, et Mgr Lefebvre appelle l’aîné de ses prêtres pour l’interroger. Que faut-il faire ? Comme l’année précédente, où il l’avait consulté pour savoir s’il fallait continuer la Fraternité malgré les injonctions de Rome, il compte sur l’ardeur de ce jeune auvergnat pour scruter les desseins de la Providence. Cette fois, c’est tout le séminaire d’Écône qui est en ébullition et les professeurs songent sérieusement à éloigner définitivement le fondateur, alors conspué pour sa prétendue rigidité. « Renvoyez-les tous ! » lui suggère sans hésiter l’abbé Aulagnier et, le lendemain, Mgr Lefebvre remercie tout le corps professoral. Avec une telle décision, il doit reconstituer en quelques semaines toute l’équipe d’enseignants. Il sait alors qu’il peut compter sur le moral inoxydable du doyen des prêtres de la Fraternité.

Il a tout fait

Pourtant, n’allons pas imaginer que l’archevêque eût été utilisé par un noyau dur. Maniant un gouvernement indépendant, il demeurait secret, se méfiait des avis imposés, mais il prenait soin de consulter sereinement. Et les idées de l’abbé Aulagnier étaient assurément celles qu’il suivait aux heures les plus graves. Celui qui fut le premier ordonné au sein de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X, admirait profondément le vénérable prélat. Même, au soir de sa vie, il aurait voyagé jusqu’à l’autre bout du monde pour défendre sa mémoire. De son côté, Mgr Lefebvre se sentait certainement ragaillardi et encouragé par la témérité, l’enthousiasme, parfois l’audace, de ce jeune prêtre plein d’élan, dont le zèle apostolique ne paraissait jamais s’amoindrir. L’un et l’autre disposaient de caractères bien différents mais tous deux, en véritables bâtisseurs, formaient un tandem à la productivité inouïe.

Nommé à l’âge de trente-trois ans à la tête du district de France, l’abbé Aulagnier établit pendant deux décennies des centaines de fondations. Il acheta des écoles. Il obtint des églises. Il monta des pèlerinages. Il lança des revues. Il soutint des associations. L’impressionnante œuvre pour laquelle Mgr Lefebvre lui accorda une véritable carte blanche constitua dès lors l’essentiel du maillage traditionaliste dans le pays, qui fut ensuite imité à travers le monde, par de multiples initiatives.

De tous ceux qui se sont engagés au sein de la Fraternité, l’abbé Aulagnier était certainement un de ceux que le prélat connaissait depuis le plus longtemps car il l’avait rencontré à Rome, à Santa Chiara, dès 1964. Et ce dernier assista aux moments-clés de l’histoire de l’œuvre. Il accompagnait déjà Mgr Lefebvre à Fribourg, lorsque les universitaires l’encouragèrent à fonder une maison de formation sacerdotale en 1969. Il n’était encore question ni d’Écône, ni de Fraternité. Quand les envoyés romains vinrent inspecter le séminaire cinq ans plus tard, il recueillit les confidences de l’archevêque. En 1976, comme sous-directeur, il l’exhorta à ne pas se laisser intimider par les premières interdictions du Saint-Siège et à poursuivre l’œuvre. L’année suivante, il joua un rôle évident pour relancer le séminaire. Lors de la réunion tenue au Pointet, le 31 mai 1988, quand toutes les voix prêchaient la prudence, l’abbé Aulagnier fut le premier à se lever pour demander à Mgr Lefebvre de procéder aux consécrations épiscopales. N’oublions pas non plus les grandes réunions dont il fut le maître d’œuvre : les jubilés sacerdotaux de l’archevêque, à la porte de Versailles en 1979, et au Bourget, en 1989, qui réunirent des dizaines de milliers de personnes.

« C’est l’amour de la messe qui m’a sauvé »

Sans doute le battant abbé avait-il mangé son pain blanc au cours de toutes ces années car la disparition, survenue le 25 mars 1991, du fondateur de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X, marqua pour lui une forme de désenchantement. L’alchimie obtenue par la conjonction entre sa fougue entraînante et la douce détermination de l’ancien missionnaire avait, semble-t-il, vécu, et ce changement de paradigme ne permit pas au bouillonnant prêtre de retrouver un équilibre auprès de ses nouveaux jeunes supérieurs qui devaient faire au mieux pour poursuivre l’œuvre. Considérant que ses intuitions l’avaient jadis conduit à suggérer la poursuite de la Fraternité en 1976, l’éviction des professeurs d’Écône en 1977, les consécrations épiscopales en 1988, il réclama énergiquement, à partir de 2000, la régularisation de sa famille religieuse, soulignant l’évolution des temps et le risque progressif d’enlisement. Pour lui, après les années de conquête, il ne fallait pas que la durée ne finisse par transformer tous ces combats en un confortable entre-soi. Afin de corroborer sa pensée, il s’appuyait en particulier sur le projet d’administration apostolique que Mgr Lefebvre avait lui-même proposé au Saint-Siège à l’automne 1987. En interne, un tel avis était encore isolé et sa discordance publique entraîna son éviction, très douloureusement vécue. Elle provoqua une situation incongrue qui consistait à voir s’éloigner de la Fraternité l’une des rares figures qui l’incarnaient historiquement.

À l’évidence, l’abbé Aulagnier songea à cette époque à la terrible solitude que l’archevêque avait vécue, lorsqu’il fut acculé à prendre ses distances à l’égard de sa congrégation des Pères du Saint-Esprit en 1968. Sa vie apostolique avait également été trépidante et il se retrouvait, du jour au lendemain, sans occupation, ne sachant où il allait déposer sa simple valise. Le risque était grand pour l’abbé de perdre de vue les principes qui avaient guidé ses combats et de justifier certaines décisions par des mobiles affectifs parés de vêtements doctrinaux. Or sa foi fervente lui a manifestement évité ce genre d’écueil. « C’est l’amour de la messe qui m’a sauvé depuis mon renvoi de la FSSPX, nous écrivait-il. Heureusement que j’ai eu la messe. Elle m’a permis de garder l’espérance et la joie de vivre. En elle, j’ai nourri ma “solitude”. Voilà ce que je veux laisser dans mon testament ». D’ailleurs, ses principes ne varièrent pas d’un iota. Quand il commençait à aborder la question du Concile ou celle de la nouvelle messe, son regard s’animait. Et même, lorsqu’il nous entretenait de l’œuvre pour laquelle il avait été ordonné, il le faisait toujours avec un grand respect, sans omettre l’adjectif auquel il tenait tant, de « la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X ». Dans les discussions, il était assez remarquable de constater que lorsque nous abordions la question des pourparlers entre le Saint-Siège et Mgr Bernard Fellay, il parlait systématiquement de « nos relations avec Rome » ou encore de « nos supérieurs ». Dans son esprit, il était toujours un fils d’Écône. Il continua à déployer son infatigable énergie en faveur des âmes, à Rolleboise et à Thiviers, de la formation des futurs prêtres de l’Institut du Bon-Pasteur à Courtalain, mais son cœur battait toujours à Écône ou à Suresnes où il avait si magnifiquement œuvré.

L’unité des combattants de la Tradition

Sans doute notre époque est-elle propice pour oublier le passé et réécrire l’histoire. L’abbé Aulagnier en était lui-même bien conscient et il ne manqua jamais de publier les mérites de son mentor. Aussi, quelles que furent les incompréhensions et blessures du passé, paraît-il difficile pour l’âme chrétienne de faire œuvre d’ingratitude et de ne pas exprimer la reconnaissance de toute une génération pour ce géant de la Tradition. Combien d’églises, de prieurés, d’écoles dont les fidèles attachés au missel traditionnel foulent les seuils quotidiennement, ont été achetés, restaurés, bénits, par cette emblématique figure ? Quel aurait été le sort du monde traditionnel si le moral sans faille de l’abbé Aulagnier n’avait pas aidé Mgr Lefebvre à confirmer ses décisions inspirées ?

Parmi les disciples du célèbre archevêque, il est d’usage de relayer l’une de ses citations, consistant à dire qu’il ne cherchait plus à reprendre contact avec ceux qui avaient quitté son œuvre. Sans conteste, il était bien l’auteur de cette phrase. Mais, aussi confortable puisse-telle paraître pour ne pas s’encombrer de cas de conscience, résume-t-elle inébranlablement toute sa pensée et son attitude ? Rien n’est moins sûr. Après avoir lu cet article, on comprend qu’en 1977 Écône a vécu sa crise majeure et quel rôle l’abbé Aulagnier y a joué. À l’époque, le chanoine Berthod, qui dirigeait le séminaire, était parti avec fracas, avec une cohorte de professeurs révoltés, tandis que les prises de position doctrinales proférées ici ou là avaient causé quelques dégâts. Le moment ne voulait-il pas que l’on tirât définitivement un trait sur ces compagnons encombrants ? Et pourtant, quelques années plus tard, le vieux chanoine avait discrètement paru aux ordinations du 29 juin. Ému d’une telle visite, Mgr Lefebvre avait accueilli avec joie l’ancien supérieur et l’avait placé, comme dans le récit évangélique, à sa droite au repas, sans se perdre dans de profondes discussions. Quelques années auparavant, il réclamait dans ses écrits le retour à cette unité des combattants de la Tradition, « étant donné les années qu’ils ont passées dans cette maison et les liens qui les unissaient à la Fraternité ». Nous nous plaisons à imaginer Mgr Lefebvre, incarnant parfaitement l’unité des vertus théologales, accueillant là-haut avec joie son disciple Paul Aulagnier, sans cesse animé par sa devise épiscopale qui l’a quotidiennement guidé au cours de ses missions et de ses fondations : « Et nous, nous avons cru en la charité ».

Lundi 07 juin 2021

Sur les routes de Chartres et de la chrétienté- Entretien avec Jean de Tauriers ( Reconstruire n°4)

Un pèlerinage peut-il avoir un lien avec la doctrine sociale de l’Église ? Oui répond clairement Jean deTauriers, président de Notre-Dame de Chrétienté, association organisatrice du pèlerinage du même nom, tout en insistant sur la royauté sociale du Christ. Quel bilan tirez-vous de l’édition 2021 du pèlerinage de Notre Dame de Chrétienté  ?

Cette année le bilan a été tout à fait exceptionnel. Nous avons eu un nombre d’inscrits très supérieur au pèlerinage de l’an passé : 11 000 marcheurs et 3 000 pèlerins anges gardiens. Le réseau des amis de Notre-Dame de Chrétienté s’est emparé de la situation particulière que nous connaissons pour organiser des pèlerinages locaux : presque 300 dans le monde. Nous sommes allés dans de nombreux grands sanctuaires français (Montligeon, Cotignac, Sainte-Anne-d’Auray etc.) Les derniers chiffres seront donnés au moment de notre rendez-vous traditionnel pour la messe d’action de grâces le 10 juin à Sainte-Odile (Paris). Cette année particulièrement, nous avons touché de nouveaux pèlerins, non habitués de Chartres. J’y vois le signe d’un enthousiasme énorme. Il est habituel de se lamenter sur le nombre de pratiquants en France. À Notre-Dame de Chrétienté, la moitié de nos pèlerins ont moins de 20 ans, les familles sont ferventes et militantes. Elles veulent pèleriner, se retrouver et montrer une chrétienté « en marche » dans le monde.

 

Quel sens donnez-vous à cette notion de chrétienté et peut-on y voir un lien avec la doctrine sociale de l’Église ?

Avec tradition et mission, la Chrétienté est l’un des grands axes du pèlerinage. Gustave Thibon a préfacé le livre de dom Gérard, l’un des fondateurs de Notre-Dame de Chrétienté, Demain, la chrétienté, avec cette phrase magnifique : « dans la chrétienté, Dieu descend à la portée de nos yeux et de nos mains, il s’insère dans les patries et les cultures, l’infini se localise, l’éternel épouse les rythmes du temps ». Il ne peut y avoir une religion séparée de la société comme on veut trop souvent nous le faire croire. Vouloir séparer les deux est une des grandes erreurs de l’époque actuelle et d’une partie de notre hiérarchie, politique et religieuse. Vouloir la chrétienté revient à mettre en pratique la loi naturelle. En ce sens, chrétienté et doctrine sociale de l’Église sont indissociables. L’encyclique de Pie XI, Quas Primas de 1925 insiste sur la royauté sociale du Christ qui est d’ailleurs rappelée dans les statuts de l’association Notre-Dame de Chrétienté. Le Catéchisme de l’Église Catholique dans son article 2105 reprend bien cette idée : « le devoir de rendre à Dieu un culte authentique concerne l’homme individuellement et socialement ». La demande de Pie XI, sur la royauté sociale du Christ, n’est que l’écho des paroles du Notre Père : « que Votre règne arrive, que Votre volonté soit faite sur la terre comme au Ciel ». Certains ont voulu croire qu’il s’agissait d’un règne spirituel pour la fin des temps, alors que la royauté sociale du Christ est pour aujourd’hui ! C’est pourquoi le thème du prochain pèlerinage en 2022 sera « Cœur Sacré de Jésus, espoir et Salut des Nations ». Je crois en effet que la France a une vocation particulière, condition de son existence : être une nation chrétienne, la fille aînée de l’Église.

 

La place que vous accordez à la doctrine sociale de l’Église dans la formation de vos cadres est donc importante ?

Oui en effet, Notre-Dame de Chrétienté est devenue un centre de formation permanent. Nous avons environ 1 000 chefs de chapitre et adjoints, et nous leur proposons régulièrement des récollections, vidéo-formations, vidéo-conférences, retraites, une Journée d’Amitié Chrétienne (la prochaine est le 20 novembre à Paris). Nous offrons également sur notre site (nd-chretiente.com) une très large documentation grâce à nos dossiers de pèlerinage. Nous restons fidèles à cet enseigne­ment traditionnel de la doctrine sociale de l’Église au cœur de la chrétienté qui est notre vocation.

Propos recueillis par Henri d’Anselme

 

Retrouvez cet article dans Reconstruire,

la lettre de formation et d’information sur la Doctrine Sociale de l’Eglise de l’Homme Nouveau

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L’Homme Nouveau offre aux pèlerins de Notre-Dame de Chrétienté

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Rejoignez la neuvaine à St Joseph pour le maintien du Motu proprio

Amis pèlerins,

chers confrères prêtres,

chers frères,

chères sœurs,

bien chers fidèles,

 

Nous vous proposons la neuvaine ci-dessous. Le titre est assez explicite, et nous espérons que vous voudrez bien vous joindre à cette mobilisation spirituelle. La prière ne fait pas tout, certes. Mais rien ne s'obtient sans la prière.

L'actualité récente de la vie de l'Eglise montre un projet de restriction concernant la place de la messe traditionnelle (ou forme extraordinaire) dans l'Eglise. Et autour de la Messe, c'est le rapport au Magistère, la pastorale, un ensemble large et cohérent, que certains souhaiteraient voir remis en cause.

Tradidi quod et accepi. J'ai transmis ce que j'avais reçu. Voilà la définition de la « pastorale tradie », s'il faut se risquer à expliquer ce concept. Voilà ce que nous voulons être, essentiellement ; de fidèles récepteurs de la foi catholique, et ensuite de fidèles transmetteurs.

On nous reproche une pastorale d'enfermement et de conservation, une formation « parallèle » aux directives de l'autorité, un problème d'obéissance. On nous soupçonne d'un esprit de raideur.

Nous aimons réaffirmer simplement que le courant traditionnel n'est peut-être pas la seule solution de la crise dans l'Eglise, mais il est une part de la solution. Nous aimons à croire que nous ne sommes pas réductibles à un « problème ».

Nous croyons à la force de l'autorité quand elle est bienveillante et paternelle. Nous croyons aussi au risque, souvent vérifié dans l'histoire, d'une réduction de l'autorité au pouvoir, et d'une tentation de faire sentir ce pouvoir au risque du droit et de la justice. Mais alors, au-delà des discours, que deviendront les conditions d'une authentique communion et d'une paix dans l'Eglise? Or c'est absolument nécessaire dans notre époque agitée.

Nous essayons humblement, chaque jour, de ne pas confondre la souplesse et la fermeté d'âme qu'inspire le Saint Esprit avec la faiblesse, la soumission aveugle, ou la raideur.

Nous savons également, avec le père Clerissac, que l'on peut avoir à souffrir non seulement pour l'Eglise mais par elle.

Ce que nous demandons, dans la pleine et visible communion de l'Eglise, c'est de pouvoir continuer à faire l'expérience pleine et sereine de la Tradition vivante. Ce n'est pas seulement un drapeau, c'est un pilier. C'est une source. La liturgie traditionnelle est un des canaux de cette source. Nous en avons besoin, nous en avons soif. C'est vital.

Nous pensons que le Motu Proprio Summorum Pontificum a créé dans l'Eglise les conditions favorables pour cela.

« Ne soyez préoccupés de rien. Mais que vos demandes soient portées devant Dieu dans la supplication et l'action de grâce, par la prière » (St Paul, Philippiens). Nous faisons donc connaître par la prière ce besoin à notre Père du ciel, en passant par celui qui en est la meilleure image sur la terre ; Saint Joseph.  « Toujours l’Eglise a exalté et honoré saint Joseph d’un culte exceptionnel, (...) ; toujours, dans les heures critiques, elle a imploré son assistance » (Pie IX, Décret Quemadmodum Deus). »

La neuvaine commencera le jeudi 10 juin, date de la Messe d'action de grâce célébrée à Ste Odile. Avec les présents, nous dirons cette prière ensemble en direct sur place. Nous serons unis par la force de la prière et de la communion des saints à tous ceux et celles qui le veulent ! Voulez-vous vous joindre à nous? Alors rendez-vous le 10 juin, seul ou en groupe, en famille, en paroisse, en communauté. Sursum corda, dans la confiance !

 

 

Neuvaine à Saint-Joseph

pour demander le maintien sans restriction dans l'Eglise du Motu Proprio Summorum Pontificum

 

Prière du frère André, l'Apôtre de St Joseph, 1845 – 1937 (Chaque jour de la neuvaine)

Saint-Joseph, père nourricier si fidèle de l'Enfant divin, époux virginal de la Mère de Dieu, protecteur puissant de la sainte Église, nous venons vers vous pour nous recommander à votre protection spéciale.

Vous n'avez rien cherché en ce monde sinon la gloire de Dieu et le bien du prochain. Tout donné au Sauveur, c'était votre joie de prier, de travailler, de vous sacrifier, de souffrir, de mourir pour lui.

Vous étiez inconnu en ce monde et cependant connu de Jésus, ses regards reposaient avec complaisance sur votre vie simple et cachée en lui.

Saint Joseph, vous avez déjà aidé tant d'hommes, nous venons vers vous avec une grande confiance.

Vous voyez dans la lumière de Dieu ce qui nous manque, vous connaissez nos soucis, nos difficultés, nos peines.

Nous recommandons à votre sollicitude paternelle cette affaire particulière, le maintien sans restriction du motu proprio Summorum Pontificum dans l'Eglise.

Nous la mettons entre vos mains qui ont sauvé Jésus Enfant, mais avant tout implorez pour nous la grâce de ne jamais nous séparer de Jésus par le péché mortel, de le connaître et de l'aimer toujours plus, ainsi que sa sainte Mère, de vivre toujours en présence de Dieu, de tout faire pour sa gloire et le bien des âmes, et d'arriver à un jour à la vision bienheureuse de Dieu pour le louer éternellement avec vous.

 

Prière du Pape François pour l'année jubilaire à St Joseph (chaque jour de la neuvaine)

Salut, gardien du Rédempteur,
époux de la Vierge Marie.
À vous Dieu a confié son Fils ;
en vous Marie a remis sa confiance ;
avec vous le Christ est devenu homme.

O bienheureux Joseph,
montrez-vous aussi un père pour nous,
et conduisez-nous sur le chemin de la vie.
Obtenez-nous grâce, miséricorde et courage,
et défendez-nous de tout mal. Amen.

 

Quelques extraits de la Lettre apostolique Patris Corde (à lire et méditer au cours de la neuvaine)

La confiance du peuple en saint Joseph est résumée dans l’expression "ite ad Joseph" qui fait référence au temps de la famine en Égypte quand les gens demandaient du pain au pharaon, et il répondait : « Allez trouver Joseph, et faites ce qu’il vous dira » (Gn 41, 55). Il s’agit de Joseph, le fils de Jacob qui par jalousie avait été vendu par ses frères (cf. Gn 37, 11-28) et qui – selon le récit biblique – est devenu par la suite vice-roi d’Égypte (cf. Gn 41, 41-44).

Joseph n’est pas un homme passivement résigné. Il est fortement et courageusement engagé. L’accueil est un moyen par lequel le don de force qui nous vient du Saint Esprit se manifeste dans notre vie. Seul le Seigneur peut nous donner la force d’accueillir la vie telle qu’elle est, de faire aussi place à cette partie contradictoire, inattendue, décevante de l’existence.

Si la première étape de toute vraie guérison intérieure consiste à accueillir sa propre histoire, (...) il faut cependant ajouter une autre caractéristique importante : le courage créatif, surtout quand on rencontre des difficultés. En effet, devant une difficulté on peut s’arrêter et abandonner la partie, ou bien on peut se donner de la peine. Ce sont parfois les difficultés qui tirent de nous des ressources que nous ne pensons même pas avoir.

Une lecture superficielle de ces récits [de l'Evangile de l'enfance de Jésus] donne toujours l’impression que le monde est à la merci des forts et des puissants. Mais la “bonne nouvelle” de l’Évangile est de montrer comment, malgré l’arrogance et la violence des dominateurs terrestres, Dieu trouve toujours un moyen pour réaliser son plan de salut. Même notre vie semble parfois à la merci des pouvoirs forts. Mais l’Évangile nous dit que, ce qui compte, Dieu réussit toujours à le sauver à condition que nous ayons le courage créatif du charpentier de Nazareth qui sait transformer un problème en opportunité, faisant toujours confiance à la Providence.

Si quelquefois Dieu semble ne pas nous aider, cela ne signifie pas qu’il nous a abandonnés, mais qu’il nous fait confiance, qu’il fait confiance en ce que nous pouvons projeter, inventer, trouver.

 

 

samedi 05 juin 2021

L'intelligence du réel comme injustice - Thibaud Collin ( L'Homme Nouveau n° 1737 du 5 Juin 2021)

La publication le 22 février dernier par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi d’une réponse négative à la question : L’Église dispose-t-elle du pouvoir de bénir des unions de personnes du même sexe ? a suscité de nombreuses réactions critiques de théologiens et d’évêques. Le 10 mai ont été organisées dans une centaine d’églises d’Allemagne de telles bénédictions (cf. HN n°1736), sans que les prêtres responsables n’aient été sanctionnés. Il convient de revenir sur ce que révèlent de tels événements ecclésiaux. Tout d’abord ils confirment le fait que « l’ouverture au monde » n’est pas synonyme d’évangélisation des personnes, voire même s’y oppose ; et s’y oppose en péchant paradoxalement par ce que l’on pourrait nommer du surnaturalisme.

En effet, c’est « au nom de l’amour » que ces prêtres homosexualistes désobéissent formellement. Puisque Dieu est Amour et que ces deux hommes ou ces deux femmes « s’aiment », il paraît évident pour eux que Dieu bénit leur relation. Le présupposé d’une telle approche est la négation de tout donné anthropologique mesurant le vrai bien humain. Or un tel donné est la manifestation de la Sagesse créatrice de Dieu et non pas une norme arbitraire formulée par une institution conservatrice gouvernée par des célibataires aigris. Le Catéchisme de l’Eglise catholique affirme: « S’appuyant sur la Sainte Écriture, qui les présente comme des dépravations graves (cf. Gn 19, 1-29 ; Rm 1, 24-27 ; 1 Co 6, 10 ; 1 Tm 1, 10), la Tradition a toujours déclaré que " les actes d’homosexualité sont intrinsèquement désordonnés " (CDF, décl. " Persona humana " 8). Ils sont contraires à la loi naturelle. Ils ferment l’acte sexuel au don de la vie. Ils ne procèdent pas d’une complémentarité affective et sexuelle véritable. Ils ne sauraient recevoir d’approbation en aucun cas[1] ». Il convient de distinguer les actes de la tendance foncière qui peut être involontaire mais que le CEC qualifie d’« objectivement désordonnée » (n°2258) et qui, à ce titre, constitue pour ceux qui la subissent « une épreuve » (idem). On comprend ici en quoi l’Eglise ne dispose pas du pouvoir de bénir de telles unions. Ce verbe est capital mais largement inaudible en ces temps de constructivisme sociologique et juridique. La loi, toute loi n’est-elle pas l’expression d’une volonté souveraine ? Dès lors, ce qu’une volonté a proclamé, une autre ne peut-elle l’abroger ? Si l’Eglise persévère dans son déni de reconnaître institutionnellement les unions homosexuelles n’est-ce pas par discrimination ? Le responsum de la CDF est à ce titre à lire attentivement. L’Eglise « refuse toute discrimination injuste », manière de dire qu’il y en a des justes. Rappelons que discriminer est l’acte par lequel la raison distingue les choses les unes des autres avec précision selon des critères définis. Aujourd’hui le terme discrimination est devenu synonyme d’injustice, ce qui est une déviation sémantique révélatrice de la confusion mentale régnant en postmodernité. En imposant ce nouveau sens, les minorités subversives introduisent un délit d’opinion dont l’objet n’est en réalité que l’activité même de la raison lisant le réel. La négation de toute intelligibilité du donné humain aboutit nécessairement à accuser d’injustice ceux qui continuent de reconnaître un ordre immanent au réel, en l’occurrence ici le fait que l’être humain est doué d’un corps sexué ordonné à transmettre la vie et exprimer le don de soi. Si l’Eglise ne dispose pas du pouvoir de bénir, c’est que l’Eglise n’est pas une démocratie libérale régie par une doctrine positiviste du droit. Elle n’est pas la mesure de son agir mais elle est l’instrument que Dieu utilise pour répandre sa grâce dans le cœur des hommes. Cette grâce théologale n’est pas à déconnecter du donné naturel.

Tous les pasteurs contestant l’enseignement de l’Eglise vivent dans un état de soumission mentale envers l’esprit de notre époque, esprit promouvant le tohu-bohu comme le disait Michel Foucault, philosophe français, figure phare du mouvement LGBT. Le tohu-bohu désigne dans la Genèse l’état de la Création avant que Dieu procède aux grandes distinctions ordonnatrices, expression de sa Sagesse et de son dessein d’amour. Les pasteurs promouvant de telles bénédictions révèlent par-là que pour eux la grâce rédemptrice est coupée de la création divine. Dieu est comme divisé d’avec lui-même, ou plutôt il convient d’abandonner un Dieu Créateur et Seigneur de l’Univers pour un Dieu Consolateur (résurgence de la vieille hérésie qu’est le marcionisme). Mais ce Dieu consolateur ne se réduit-il pas dans une perspective immanentiste à être un Dieu nounou à la mesure de nos attentes ? La grande tentation actuelle est de réduire l’ordre de la grâce à une version chrétienne du mouvement care, terme anglais désignant le vaste et complexe courant philosophique, psychologique et spirituel promouvant le soin de soi. Il est certes fort utile que l’Eglise s’empare d’une telle problématique du soin mais cela ne peut être fécond qu’au terme d’un long discernement théorique et pratique par lequel seront articulées la nature et la grâce. Seule une telle articulation permettra de répondre en vérité à la soif, souvent inconsciente, de nos contemporains. Le Verbe s’est fait chair pour nous sauver et non pas pour nous donner de vivre en bonne santé. 

Les récents événements de l’Eglise d’Allemagne révèlent enfin la logique inéluctable à laquelle obéit la pensée humaine. Une fois que l’on a validé certains principes, on ne peut pas sans se contredire en nier les conclusions nécessaires. Le principe de toute cette dérive pastorale et doctrinale est le refus de recevoir Humanae vitae, l’encyclique de saint Paul VI sur la régulation naturelle des naissances. Ce refus est fondé sur une incompréhension de la doctrine de la loi naturelle. Cette « hérésie du XXème siècle », pour reprendre le mot de Madiran, rend l’esprit de nombre de nos pasteurs perméable à la protestation victimaire actuelle. Au lieu de recevoir la lumière sur la nature de la sexualité humaine et sur le fondement de la morale que saint Jean- Paul II a transmise pour notre temps (dans ses catéchèses sur la théologie du corps et dans l’encyclique Veritatis splendor) beaucoup ont préféré se tourner vers les sciences humaines et sociales pour fonder une pastorale de « l’ouverture au monde ». Ainsi en s’ouvrant à l’esprit du monde, ils s’empêchent de transmettre le salut à ceux qui y habitent. Paradoxe tragique.                    

 

[1] n°2357

mercredi 02 juin 2021

Requiem in pace Jean-Pierre Hachard

C’est avec une immense tristesse qu’en ce dimanche 30 mai 2021, jour de la fête des mères, nous apprenions, au cours de la messe dominicale, le décès de Jean-Pierre Hachard, qui fut un grand ami du pèlerinage et de l’association Notre-Dame de Chrétienté. Il allait avoir 80 ans.

Originaire de Charente Maritime où il passa sa jeunesse, Jean-Pierre avait rejoint la région parisienne au début des années 70 pour poursuivre ses activités professionnelles au sein de la société Philips, dont il deviendra un cadre dirigeant, et s’installa avec sa famille aux environs puis dans la ville de Versailles.

En bon catholique de tradition, soucieux de l’éducation et de l’avenir de ses enfants, il s’investit très vite dans le suivi de leurs activités scolaires et associatives, ce qui le conduisit à prendre la présidence de l’Apel de l’Institution St Pie X qu’il exerça pendant de nombreuses années … et à s’engager au sein de l’organisation du Pèlerinage de Chrétienté. C’est ainsi que pendant près de 10 ans, il assura avec son épouse la direction de l’équipe chargée de l’accueil des prêtres pendant le pèlerinage.

Très apprécié de tous pour son sens de l’organisation, sa compétence, son tact et sa grande courtoisie, il apparut naturellement comme le candidat idéal pour succéder à Marie-Louise Prévost, comme Secrétaire Général de l’association Notre-Dame de Chrétienté. Il occupa ce poste de 2006 à 2009, avec un dévouement et une efficacité remarquables.

 Homme de conviction et d’une droiture exemplaire, chrétien fervent, ami très sûr, Jean-Pierre va nous manquer dans ces moments difficiles que nous traversons. Nous avons prié pour lui au cours de notre dernier pèlerinage et espéré qu’il réussirait à surmonter la mauvaise maladie qui l’a emporté.

Que son épouse, Badou, elle-même si dévouée à notre association, ses 4 enfants (dont une religieuse, Sous-Prieure des Dominicaines du St Esprit), ses 19 petits-enfants (dont un prêtre) et ses 4 (bientôt 6) arrière-petits-enfants, trouvent ici l’expression de nos sentiments les plus amicaux et l’assurance de nos ferventes prières.

Notre-Dame de Chrétienté