Culture de Chrétienté : "Peindre à Rome"

à la Galerie Tarantino

Nous invitons nos amis parisiens ou de passage à Paris à visiter l'exposition "Peindre à Rome" à la Galerie Tarantino.
(38 rue Saint-Georges, Paris 9e). Du lundi au samedi, de 10 heures à 19 heures.

Pour vous présenter cette exposition nous reproduisons l'article qui lui a été consacré dans "Présent"

À la galerie Tarantino : Peindre à Rome

2011.03.27_Peindre_a_Rome_b.JPGLa romanité picturale des XVIIe et XVIIIe siècles est à l’honneur galerie Tarantino. Classicisme et baroque suivent leurs voies, qui ne sont pas parallèles : elles se croisent, se tempèrent, voient converger des peintres de tout pays. Les œuvres sont diverses mais non disparates.

Quelques Français
De Simon Vouet (1590-1649), artiste important par l’œuvre et par les élèves (Le Sueur, Le Brun, Mignard…), voici une Apothéose de saint François de Paule. Les tons bruns sont éveillés par le jeu de l’or orangé et des gris sombres des nuages. Vouet fut une quinzaine d’années à Rome, pensionné par Louis XIII, qui ensuite le rappela en France.
La Sainte Famille de Le Brun (1619-1690), peinte à Paris, est pleine de réminiscences romaines. Elle est un hommage à Poussin qu’il fréquenta lors de son séjour à Rome entre 1642 et 1645, à sa Madone dite Roccatagliata (musée de Detroit). Les maladresses sont visibles, l’harmonie peu heureuse. Le Brun n’est pas encore en possession de son métier.
Un peintre bourguignon emmena ses deux fils peintres faire le tour d’Italie ; ils s’y fixèrent. L’aîné, Jacques (1621-1676), suivit une armée et se spécialisa dans les scènes de bataille. Veuf, il fut soupçonné d’avoir empoisonné sa femme, et prit l’habit de frère laïc chez les Jésuites où il continua à peindre. La scène d’après bataille (plume et encre brune) est une idée jetée sur le papier d’une main sûre. Deux Courtois au Louvre sont accrochés si haut, avec tant de reflets, qu’il vaudrait mieux pour eux ne pas l’être.
Jacques Courtois fut ami avec Cortone ; Guillaume, le cadet (1628-1679), fut son élève, avant d’être celui du Bernin. Il collabora aux travaux de son frère tout en conduisant les siens propres, qui sont de qualité. A Rome on voit le Martyre de saint André, tableau d’autel de Saint-André au Quirinal, que les Itinéraires romains font l’erreur d’attribuer à Jacques. (Les frères portaient le même surnom : « Il Borgognone ».) Guillaume, taciturne, s’exprimait avec difficulté ; par le pinceau, avec bonheur. Moïse et le serpent d’airain est un petit tableau très original. La Trinité est une toile aux couleurs contrastées. L’ensemble est d’une belle lumière et l’ange qui présente la couronne d’épines est, dessin et coloris, fort bien venu. Plus tardive, vers 1670, sa Vierge à l’Enfant est « caractérisée par un style baroque tempéré en un sens classique » (illustration). On aime la fraîcheur de l’ensemble, et les morceaux libres et maîtrisés que sont le linge de la crèche, la paille, les mains de la Vierge. Guillaume Courtois est un grand peintre.

Quelques Italiens
Nous avons mentionné Cortone ; il est à l’honneur au Louvre, en compagnie d’un autre élève, Ciro Ferri. (Nous y reviendrons.) M. Tarantino a rassemblé plusieurs dessins de Ferri.
Autre élève de Cortone, Lazzaro Baldi, dont un dessin coloré très séduisant présente Sainte Rose de Lima offrant une fleur à l’enfant Jésus. La première sainte du Nouveau Monde fut canonisée en 1671 et Baldi peignit un tableau pour Santa Maria sopra Minerva.
Non moins nombreux furent les élèves de Maratta. Chiari et Passeri sont par excellence deux peintres de Rome où se trouve l’essentiel de leurs œuvres – le Louvre possède quelques tableaux du maître et de l’école.
Chiari peint, dans la décennie 1690, le Génie des Arts. L’adolescent ailé est entouré des attributs de la poésie, de la sculpture, de la peinture, de la musique. D’un pinceau léger, ces ustensiles et outils sont d’un style supérieur au génie lui-même, peint dans le coton. La matière de La Vierge apparaissant à saint Luc peignant la Pieta, morceau de plus de 2 m de haut, est lourde et grasse. Mais quel peintre resterait insensible à une image de son saint patron ?
Passeri (1654-1714) fut le disciple préféré de Maratta. Deux esquisses, une Assomption et une Trinité – avec divers saints et saintes – datent de la maturité. Même si nous sommes dans des études pour de grandes peintures décoratives, coloris et touches forment un métier charmant mais un poil (de martre) trop charnel pour le sujet. Il est plus adapté à la scène tirée de la Jérusalem délivrée que possède le Louvre.
Le caractère religieux paraît davantage chez deux autres élèves de Maratta. Girolamo Pesci (1679-1759), petit maître mais grand tableau que cette Prédication de saint Paul : le paysage, les nombreuses figures que surplombe saint Paul en font une œuvre forte. Szymon Czechowicz (1689-1775), un Polonais à Rome, peint la Vierge remettant le scapulaire à saint Simon Stock. Une touche fluide, des poses variées, une composition inspirée : encore un heureux exemple de romanité parmi tous ceux que donne cette passionnante exposition de la galerie Tarantino.

www.galerietarantino.com
• Peindre à Rome, tableaux et dessins des XVIIe et XVIIIe siècles. Jusqu’au 21 avril 2011, Galerie Tarantino (38 rue Saint-Georges, Paris 9e). Du lundi au samedi, de 10 heures à 19 heures.

SAMUEL
Article extrait du n° 7315 du samedi 26 mars 2011