Audience générale de Benoît XVI : La liturgie orientée à Dieu

Audience générale de Benoît XVI - mercredi 26 septembre :

"Chers frères et sœurs, en relation étroite avec la Parole de Dieu, la liturgie est une source précieuse pour grandir dans la prière. Elle est le « service » du nouveau Peuple de Dieu formé grâce au Mystère pascal. À travers elle, le Christ, grand Prêtre, continue son œuvre de Salut. En commençant ses travaux avec le thème de la « liturgie », le Concile Vatican II a mis en relief le primat absolu de Dieu.
Le critère fondamental pour la liturgie est son orientation à Dieu, qui nous fait participer à son œuvre, dont le sommet est le Mystère de la Mort et de la Résurrection du Christ. La Rédemption du monde et de l’homme est actualisée dans l’action du Christ à travers l’Église et dans la liturgie, particulièrement dans le Sacrement de l’Eucharistie et de la Réconciliation, et les autres actes sacramentels.
La liturgie est le lieu privilégié de la rencontre avec le Seigneur. Toute bonne célébration liturgique est une prière et un dialogue avec Dieu, caractérisé par l’harmonie entre ce que nous disons et ce que nous portons dans le cœur. Dans une telle attitude, nos cœurs se libèrent des pesanteurs d’ici-bas et s’élèvent vers le haut, vers la vérité et l’amour. Dieu lui-même nous donne les paroles justes pour nous adresser à Lui, par les psaumes, les grandes oraisons de la liturgie et dans la célébration eucharistique."

Sur son blog l'abbé Guillaume de Tanoüarn donne un beau commentaire de ces paroles de Benoît XVI :

Tournés vers le Seigneur

par l'abbé Guillaume de Tanoüarn

Aujourd'hui, lors de l'audience générale Place Saint Pierre, le pape a eu ces mots qui méritent de rester à la postérité : "Là où le regard de Dieu n'est pas déterminant, tout le reste perd son sens. Le critère fondamental dans la liturgie est son orientation vers Dieu, nécessaire pour participer à son oeuvre".
Orientation vers Dieu : il s'agit avant tout de la prière du Ministre qui "élève son coeur" vers Dieu ; il s'agit de l'aptitude d'une liturgie à transporter l'assemblée dans le monde de l'Esprit et à pénétrer toute vie d'un élan intérieur irrépressible.
Mais le propre de la liturgie c'est d'inscrire dans le sensible l'effet intelligible que le geste porte en soi. On doit donc dire que le pape entend bien favoriser une célébration "tournée vers le Seigneur", où parce que les fidèles regardent tous dans la même direction avec intensité, le prêtre ne saurait leur faire face en fixant seul la direction opposée.
Autant dans la première partie de la messe, il est digne et juste qu'il y ait une pédagogie humaine, non pas pour faire obstruction à la Parole de Dieu avec des précompréhensions trop humaines, représentant nos pauvres préjugés, mais pour faire en sorte que cette Parole résonne telle qu'elle est. Pas besoin d'emballage !
"Vivante, en effet, est la parole de Dieu, énergique et plus tranchante qu’aucun glaive à double tranchant. Elle pénètre jusqu’à diviser âme et esprit, articulations et moelles" (Hébr. 4, 12).
Dans la première partie de la messe, la pédagogie consiste à ne pas censurer la Parole de Dieu (comme elle l'est dans certains lectionnaires), à ne pas l'édulcorer avec des traductions douceâtres ou simplement fausses. Pas besoin de prendre non plus un ton de circonstances. Rien n'est plus NATUREL que la Parole de Dieu, pas besoin de s'exciter : "Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas".
Autant durant le Sacrifice (offertoire, consécration, communion), il suffit de se laisser transpercer par l'action de Dieu. La messe n'est pas seulement une image analogique de la réalité du sacrifice de la Croix, image devant laquelle nous aurions à nous trouver dans les meilleures conditions possibles, comme à un spectacle, non ! Pendant le sacrifice nous sommes tous tournés vers le Seigneur. Le sacrifice de l'autel a lieu dans notre coeur, qui est la Crèche où repose l'homme-Dieu. Et le silence liturgique est la première manière de réaliser cette orientation spirituelle, en quoi consiste le sacrifice de la Messe.
Qu'est-ce que le sacrifice de la messe, sinon "ce qui manque à la passion du Christ", notre inclusion, notre participation au sacrifice de la Croix. Pour participer à l'oeuvre du Christ, que faut-il ? Des titres particuliers ? Des capacités supérieures ? Des actions d'éclat ? Non : comme le note Benoît XVI, il suffit que nous nous orientions vers lui. Orientation physique, liturgique. orientation spirituelle : c'est le cas de répéter avec Péguy que "le spirituel est lui-même charnel".
Et le pape ajoute que cette orientation est "le critère" d'une bonne ou d'une mauvaise liturgie. Si la liturgie ne nous oriente pas vers le Seigneur, elle n'est rien, qu'une gesticulation qui tiendrait soit du ballet soit de l'animation, mais pas de l'action sacrée. Il ajoute ici une dimension épistémologique" que la réforme liturgique a rendu indispensable. Comme il faut INTERPRETER Vatican II, il faut aussi INTERPRETER la liturgie qui en procède. Quels sont les critères ? Le pape n'en donne qu'un : l'orientation vers le Seigneur.