La "droite" ferait mieux de se livrer au devoir d’inventer

Yves de Kerdrel dans Valeurs Actuelles (extraits)

D'Yves de Kerdrel dans Valeurs Actuelles :


Mark Twain a écrit cette phrase très juste : « La gauche invente des idées nouvelles que la droite adopte sitôt qu’elles sont usées. » C’est ce qui vaut sans doute à notre cher et vieux pays d’avoir « la droite la plus bête du monde », pour reprendre la célèbre formule de Guy Mollet. La gauche a inventé ce crime contre la croissance qui s’appelle l’ISF. La droite chiraquienne l’a repris à son compte et l’a même durci. La gauche a inventé les 35 heures. La droite, en raison des mesures alors prises par François Fillon, les a légitimées et en a fait un acquis social. La gauche a inventé l’écologie politique. La droite l’a reprise à son compte pour en faire l’insupportable principe de précaution. (...)

Pour éviter toute illusion sur les capacités de la "Droite" il faut revenir à la description qu'en a donnée Jean Madiran ("La droite et la gauche", 1977) :

"La distinction entre une gauche et une droite est toujours une initiative de la gauche, faite par la gauche au profit de la gauche. Il y a une droite dans la mesure où une gauche se forme, la désigne, s’oppose à elle : l’inverse n’est jamais vrai. Ceux qui instaurent ou relancent le jeu droite-gauche se situent eux-mêmes à gauche, ils délimitent une droite pour la combattre et pour l’exclure. Dans un second moment, la droite ainsi désignée et prise à partie se serre les coudes, ordinairement ni assez vite ni assez fort, s’organise, se défend, contre-attaque, quelquefois victorieusement : ce n’est jamais que défense et contre-attaque, voire représailles.
Par suite, est “de droite” celui que la gauche désigne ou dénonce comme tel : et l’inverse n’est pas vrai. Cet arbitraire va de soi, puisque le jeu gauche-droite, qui est plus exactement le jeu gauche contre droite, est inventé, mené et arbitré toujours par la gauche, jamais par la droite.
La droite sait ou sent qu’elle subit le jeu sans pouvoir en fixer ou en modifier les règles. (...) Elle n’en a ni le droit ni la possibilité, ce n’est pas elle qui place les étiquettes sur les flacons. La gauche au contraire, maîtresse et arbitre de ce jeu qui est le sien, rejette à droite qui elle veut, comme elle veut, selon l’occasion et l’intérêt tactique."