Les crèches dans les lieux publics

Alors que le Conseil d'Etat a rendu hier sa décision (voir ici le commentaire d'Yves Daoudal) rappelons la très forte lettre que Philippe de Villiers avait adressée le 28 octobre au président de la Haute Assemblée.

20161109CrecheVilliers.jpgPhillippe de Villiers
le 28 octobre 2016

Monsieur le Président,

J'ai lu dans la presse que la Haute Assemblée allait statuer, le 3 novembre, sur la question des crèches dans les lieux publics.

Il m'a semblé opportun, bien qu'inhabituel et même insolite, de m'adresser à vous directement pour vous apporter un éclairage personnel et circonstancié sur la genèse de cette affaire, du fait même que l'une des crèches concernées est celle de la Vendée et qu'elle a été initiée par mes soins.

Dès mon élection à la présidence de l'Assemblée départementale, j'ai décidé d'installer une grande crèche dans le hall d'accueil de la Maison du Département. Il s'agissait, pour moi, comme je l'ai dit à l'époque, d'un "acte de ressourcement patrimonila et identitaire", afin de faire vivre les racines chrétiennes de la Vendée et de la France. J'avais moi-même commandé les personnages sculptés à l'orientale au monastère de Bethléem.

L'idée d'un distinguo subtil et incompréhensible entre le culturel et le cultuel me paraissait déjà complètement dépassée par l'évolution de la société. Toute culture est fille du religieux, comme le démontre anthropologiquement l'oeuvre de René Girard notamment. Une crèche est à la fois de l'ordre du culturel et de l'ordre du cultuel : les personnages de la crèche - Jésus, Marie, Jospeh - appartiennent à une hsitoire religieuse qui relève du cultuel. La crèche elle-même appartient à une tradition ancienne qui relève du culturel.

Si vous séparez, par un artifice juridique, le culturel et le cultuel, vous sapez les fondements de la laïcité elle-même et le rempart qu'elle constitue par rapport à l'islam, qui ne reconnaît pas la distinction du normatif et du religieux.

En réalité, il n'y a que deux laïcités possibles, l'une vivante et l'autre mortifère :

  • la laïcité dans son sens originel chrétien - "Rendez à César ce qui est à César" -, et qui s'accorde à nos traditions en respectant nos héritages.
  • la laïcité du vide qui, sous prétexte de neutralité, s'offre comme un espace de convoitise, un appel d'air, à la déferlante d'une autre civilisation, conquérante par essence, de par la seule application des prescriptions coraniques.


C'est dans cet esprit que j'ai installé la crèche de Vendée au coeur d'un lieu public. Comme d'ailleurs le logo du double coeur sur les voiles du Vendée-Globe. C'était un acte de civilisation.

Un peuple - le peuple français - possède un double droit inaliénable : le droit à la continuité historique, donc le droit de protéger ses symboles y compris religieux - les crèches, les cloches, les fêtes religieuses, etc ; et le droit de cultiver les richesses anthropologiques de sa Il n'y a qu'une seule issue raisonnable pour que la laïcité ne soit pas une aspiration du vide, c'est de se référer, en passant par-dessus le cultuel et le culturel, à la notion de prééminence que légitiment l'antériorité historique - le christianisme est arrivé en France au IIème siècle - mais aussi la supériorité morale de la civilisation fondée sur la condamnation de la violence, la liberté personnelle et l'égale dignité des êtres humains.

C'est dans cet esprit que j'ai installé la crèche de Vendée au coeur d'un lieu public. Comme d'ailleurs le logo du double coeur sur les voiles du Vendée-Globe. C'était un acte de civilisation.

Un peuple - le peuple français - possède un double droit inaliénable : le droit à la continuité historique, donc le droit de protéger ses symboles y compris religieux - les crèches, les cloches, les fêtes religieuses, etc. ; et le droit de cultiver les richesses anthropologiques de sa civilisation - la place éminente de la personne, de la femme, l'absence manifeste d'équivalence morale entre le Sermon sur la Montagne - "Heureux les doux" - et le Serment du Sabre - "Tuez-les-tous".

La décision que vous allez prendre est d'une extrême gravité ; elle vient après celle du burkini.

Les conseillers d'Etat ont dit oui au burkini. S'ils disent non aux crèches, la Haute Assemblée que vous présidez changera de nature dans le coeur des Français : ce ne sera plus le Conseil d'Etat de la France qui nous protège, mais le Conseil d'Etat islamique.

Le discrédit des institutions pourrait bientôt nous emporter loin de l'Etat de droit si, par un juridisme absurde au service d'une laïcité dévoyée et transformée en une miniature illusoire de la ligne Maginot, vous refusez nos racines, notre histoire, notre personnalité et ce qui fonde nos valeurs européennes et occidentales au moment même où la France et l'Europe deviennent peu à peu une terre d'islam.

Le pays tout entier attend votre décision.

Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l'expression de ma haute considération.