Avortement : le "délit d'entrave numérique" devant l'Assemblée le 1er décembre

Les réactions de Grégor Puppinck, Jean-Marie Le Mené, les AFC, Cardinal André Vingt-Trois, etc

le 1er décembre 2016

Thibaud Collin : IVG - Peut-on espérer que François Fillon s'engage dès maintenant à abroger cette loi inique une fois élu ?


Bien qu'absent de l'Assemblée nationale aujourd'hui, c'est une véritable question à poser à François Fillon pour savoir s'il a vraiment la volonté de s'opposer à la domination idéologique de la gauche ou si il se couche dès maintenant acceptant l'effet de cliquet des réformes sociétales de gauche.

«Pas de liberté pour les ennemis de la liberté!». Saint-Just est-il devenu la référence impensée du gouvernement Valls? Comment comprendre autrement que la liberté, réclamée haut et fort lorsqu'il s'agit de permettre aux femmes d'avorter, soit pénalisée quand il s'agit de proposer aux mêmes femmes des matériaux de discernement pour mûrir leur choix? La seule solution pour résoudre cette contradiction est de conclure que la femme qui se pose des questions sur le devenir de sa grossesse n'est libre que d'avorter. C'est un choix obligatoire comme les élections dans les régimes politiques au Parti unique! Telle est la conception ubuesque de la liberté qui anime cette proposition de loi.
Car jusqu'à nouvel ordre lorsqu'on délibère en vue de poser un choix, plusieurs possibilités se présentent à notre esprit et c'est pour cela qu'il s'agit de s'enquérir de leurs avantages et inconvénients respectifs en s'informant et en prenant conseil. Ce constat de bon sens est balayé d'un revers de main. La majorité socialiste absolutise à ce point la liberté de la femme de «disposer de son corps» que tout ce qui peut leur apparaître comme le commencement d'une remise en question de cette dite liberté est vue comme un obstacle à réduire de toute urgence. Cette tendance à simplifier à l'extrême une réalité humaine complexe s'appelle du fanatisme ou de la bêtise, les deux n'étant jamais bien loin.
Cette paranoïa liberticide est de plus une insulte faite à toutes les femmes enceintes qui se posent des questions, hésitent et cherchent une issue parfois dans un profond désarroi. Mais l'idée même que l'avortement puisse être associé à une situation angoissante est insupportable à ce féminisme paternaliste qui lui sait que l'avortement est un acte banal. Une nouvelle fois dans sa déjà longue carrière, l'idéologie de la liberté absolutisée nie les libertés concrètes des personnes immergées dans l'épaisseur de leur itinéraire de vie. Laissons donc les idéologues du «camp du Bien» dans leur enfermement mental et adressons-nous à l'opposition parlementaire, probable future majorité.
François Fillon ayant mis les libertés au cœur de son projet, peut-on espérer qu'il s'engage dès maintenant à abroger cette loi inique s'il est élu à la présidence de la République? La question mérite d'être posée tant le parti dont il vient de prendre la tête nous a habitué à un triste scénario: effets oratoires et guerre d'amendements contre une loi déclarée injuste suivis, une fois revenu aux affaires, d'une lâche génuflexion devant le soi-disant sens de l'histoire. Conservateurs dans l'opposition, progressistes au pouvoir. Cette incohérence intellectuelle n'est pas pour rien dans le discrédit des partis dits de gouvernement.
On peut espérer que François Fillon en a pris conscience et qu'il est prêt à transgresser enfin cette loi implicite que toute réforme sociétale devienne inéluctablement objet d'un consensus. Ce serait une belle manière de signifier à la Gauche que son monopole métapolitique est fini.

le 1er décembre 2016

Jacques Bompard : Intervention à l'Assemblée nationale


le 1er décembre 2016

Grégor Puppinck : le renversement de perspective survenu entre 1974 et 2014 n’est qu’apparent

20161129DelitEntraveIVG.jpgIl y a bien continuité entre la loi Veil et les lois liberticides du PS

"(...) Que s’est-il passé pour que l’avortement, de toléré au nom du moindre mal, devienne en France un fondement essentiel du progrès social ? Nulle révolution, mais la poursuite du même mouvement de fond qui avait déjà permis la loi Veil : l’érosion progressive de la conscience de la valeur de la vie prénatale et l’affirmation corrélative de celle de la volonté individuelle. Mais ce double mouvement n’en est qu’un : la domination croissante de la volonté sur l’être dans une culture perdant son intelligence métaphysique, c’est-à-dire la compréhension de l’identité et de la valeur de l’être en soi. Ainsi, le renversement de perspective survenu entre 1974 et 2014 n’est qu’apparent : il résulte d’un abandon des reliquats de métaphysique qui revêtaient encore la vie humaine prénatale d’une certaine dignité.
Selon le point de vue matérialiste, dépourvu de métaphysique, les vies humaines au stade prénatal ne valent rien en elles-mêmes : elles sont des agrégats de matière à un stade encore précoce d’un processus d’individualisation progressive qui se poursuit encore longtemps après la naissance. Déjà pour Cabanis, le médecin et philosophe des Lumières, « le fœtus n’est pour ainsi dire qu’un mucus organisé ». Encore dépourvues de conscience et de volonté propres, ces vies humaines n’ont de valeur que dans et par la volonté des adultes qui en ont la responsabilité. Leur vie vaudra à la mesure du projet que l’adulte est capable de former à leur égard, puis à mesure de leur niveau de conscience, c’est-à-dire d’autonomie.
À présent, ignorant l’âme et la dignité inhérente de chaque vie humaine prénatale, et même l’individualité de l’être conçu et porté, le discours sur l’avortement se réduit souvent à une affirmation unilatérale de la volonté individuelle, comme en témoignent l’expression « un enfant si je veux, quand je veux », et les slogans de la campagne gouvernementale de 2015 : « Mon corps m’appartient », « IVG, mon corps, mon choix, mon droit ». Une telle campagne ne vise pas la prévention de l’avortement, mais bien plus sa promotion, comme s’il n’était pas un mal à éviter, mais une liberté, un bien à posséder. Dans quel but ?
Promouvoir l’avortement comme une liberté exprime un choix philosophique fondamental : celui de la domination de la volonté sur l’être, choix qui s’avère être le fondement de la postmodernité. Ce choix dépasse, par ses enjeux, la question de la régulation des naissances.
La pratique légale et massive de l’avortement transforme le rapport de notre société à la vie humaine : elle la désacralise et dénature la procréation ; elle libèrerait ainsi l’homme de son respect superstitieux envers la nature. L’avortement ouvre alors la voie à la maîtrise rationnelle de la vie humaine considérée comme un matériau ; l’humanité accroît sa faculté de se façonner elle-même, elle est davantage « maitre et possesseur de la nature » dans le prolongement du projet cartésien. Pierre Simon, le principal artisan de la libéralisation de la contraception et de l’avortement en France, déclarait en 1979 : « La vie comme matériau, tel est le principe de notre lutte », « il nous appartient de le gérer », « comme un patrimoine ». (...)
Par contraste, les opposants à l’avortement ne seraient que des idolâtres de la vie et des ennemis du progrès, car ils n’auraient pas admis que la vie n’est que matière, tandis que la conscience est esprit, le propre de l’homme et son seul bien véritable. Cette conception du progrès résulte d’une mise en opposition du corps et de l’esprit. Cette dialectique, profondément ancrée dans l’imaginaire humain, est destructrice de l’unité humaine : la volonté ne peut pas, sans souffrance, se retourner contre son propre corps, ni s’élever contre lui. Affirmer « l’IVG est ma liberté » revient à s’imposer une mutilation ; mais celle-ci, pas plus que les piercings et les tatouages, ne parvient à spiritualiser le corps.
Cette négation du corps au profit de l’esprit est l’aspiration angélique, antique et manichéenne ; elle a une dimension métaphysique. Cette négation du corps au profit de l’esprit, le Christ y a répondu en s’incarnant. En se faisant chair, le Verbe, l’esprit de Dieu, a élevé le corps à une dignité qui dépasse tout ce que l’homme peut atteindre par ses propres forces. Chaque fois que l’Eucharistie est consacrée, la matière la plus ordinaire est élevée à la plus haute dignité ; chaque fois qu’une femme et un homme communient à l’Eucharistie, chaque fois qu’ils s’unissent et transmettent la vie, ils participent à l’unité vitale des personnes divines dans la Trinité.
Ainsi parle Yahvé « je mets devant toi la vie ou la mort, la bénédiction ou la malédiction. Choisis donc la vie, pour que vous viviez, toi et ta descendance » (Deutéronome 30, 19)."

le 30 novembre 2016

Communiqué des AFC :

"Demain, jeudi 1er décembre, sera débattue à l'Assemblée Nationale la proposition de loi du groupe socialiste faisant suite à l'initiative de Laurence Rossignol, Ministre des Familles, de l'Enfance et des Droits des femmes, qui considère que faire état sur internet des risques liés à l'avortement et proposer d'autres voies que celle de l'IVG est un "délit d'entrave numérique", passible de 30 000€ d'amende et de 2 ans de prison.
Cette proposition de loi vise les sites internet qui présentent des alternatives à l'avortement, et proposent des lieux d'écoute et d'information sur les conséquences d'un avortement, à rebours du "tout avortement" déployé progressivement depuis 2014 :

  • L'IVG devient un droit fondamental : novembre 2014
  • Suppression de la condition de détresse : août 2014
  • Suppression du délai de réflexion : avril 2015
  • IVG remboursée à 100% : avril 2016

L'objectif du Gouvernement serait-il donc de faire de l'avortement l'issue normale d'une grossesse ?
Les Associations Familiales Catholiques s'insurgent, comme elles l'ont déjà fait, contre cette proposition de loi idéologique qui bâillone la liberté d'expression et porte gravement atteinte à la liberté de conscience des femmes. Or, les Français et les professionnels de santé s'alarment du nombre toujours très élevé d'IVG. Est-ce en libéralisant et en poussant les femmes à avorter qu'on va résoudre ce problème ? Comme le dit le Pr Israël Nisand dans Le Figaro d'aujourd'hui, "la meilleure IVG est celle que l'on n'a pas eu besoin de faire".
Faut-il également rappeler à Madame Rossignol qu'un très récent sondage IFOP "Les Français et l'IVG" (septembre 2016) révèle que 72% des Français pensent que la société devrait faire plus pour éviter aux femmes l'IVG et 89% pensent que l'avortement laisse des traces psychologiques difficiles à vivre ?
L'existence et le succès de ces sites internet sont la preuve que la propagande officielle du "tout avortement" ne répond pas aux besoins des femmes. Confronté à cet échec, le Gouvernement déploie une réaction de faible, en cherchant à bâillonner la liberté d'expression et en menant un combat idéologique et inefficace, dont on peut même penser qu'il aurait des visées électoralistes dans le contexte politique actuel.
Les AFC considèrent que le nombre très élevé d'avortements en France constitue un problème de santé publique et devrait être traité comme tel, c'est-à-dire en étudiant les facteurs de risque et en luttant contre ces mêmes facteurs de risque."

le 30 novembre 2016

Tribune de Jean-Marie Le Méné dans Valeurs Actuelles

Avortement : c'est le gouvernement qui désinforme gravement

"Le nouveau délit d’entrave à l’IVG que le Gouvernement veut imposer « en procédure accélérée », discuté à l’Assemblée Nationale jeudi 1er décembre, part du postulat que certains sites diffusent des informations faussées dans un but dissuasif. D’où l’idée dorénavant répandue que tenter de dissuader de l’avortement serait par principe induire les femmes en erreur et donc serait systématiquement condamnable. En revanche, une information - celle du gouvernement ou du Planning par exemple – qui est clairement de nature incitative, est présumée juste.
C’est tout de même un peu facile. Malheureusement pour le gouvernement, le raisonnement ne tient pas. Il suffit de se reporter au site du ministère de la Santé qui décrit les IVG instrumentale et médicamenteuse. La description de l’IVG instrumentale se limite à “une aspiration de l’œuf” qui sera suivie d’un contrôle permettant de s’assurer qu’il ne reste pas de “fragments de grossesse” (sic). La grossesse devient un OVNI susceptible d’exploser… en laissant des “fragments de grossesse” !
De qui se moque-t-on ? Est-ce cela le modèle d’information responsable d’un site public qui s’érige en parangon de vertu ? Quant à la description de l’IVG médicamenteuse, elle est encore plus lapidaire : “la méthode consiste à prendre deux médicaments différents (comprimés) puis à vérifier que la grossesse est bien interrompue”. Abracadabra ! Même dans le dictionnaire on en apprend davantage.
Pas une seule fois, les termes d’embryon et de fœtus ne sont utilisés, ni ceux qui indiquent qu’on supprime des vies humaines, ce qui n’est pas rien. Les mots aussi sont avortés. Le fait de renoncer volontairement au vocabulaire dédié, mal nommer les choses, contribue au malheur des femmes qui découvrent trop tard qu’elles doivent faire un deuil. Et comme, dans la vraie vie, on ne fait pas le deuil d’un “fragment de grossesse” mais d’un enfant, la chute est d’autant plus rude.
La réalité est autre. Ce qui est dissuasif de l’avortement, ce n’est pas l’information fausse, c’est l’information juste. Une information objective sur l’avortement – capable de nommer les choses – est par nature et à juste titre dissuasive. Dire “on va aspirer un œuf” ou “on va détruire l’embryon ou le fœtus que vous portez” n’a pas du tout le même sens et peut ne pas entraîner les mêmes conséquences pour une femme, un couple, une famille, la société tout entière.
La formulation la plus proche de la réalité est la seconde mais elle est dissuasive par construction. Naturellement, les militants des “illégalités fécondes” n’en veulent pas. Or ce sont eux qui tiennent le haut du pavé idéologique depuis 40 ans et cela quelle que soit la majorité au pouvoir. Ce faisant, ce sont eux qui désinforment.
Manquait une clé de voute, un dispositif qui empêche quiconque de lever un coin du voile, de dénoncer “le mensonge qui tue” selon le mot de l’historien Pierre Chaunu. Voilà qui est chose faite. Les grands procès de Moscou sont de retour pour ceux qui oseraient se mettre au service de la vérité. Qu’ils tentent de proposer une alternative à un acte de mort et on opposera les hommes à leurs femmes, les enfants à leurs parents, les élèves à leurs maîtres, les patients à leurs médecins, les ouailles à leurs pasteurs.
Comme dans le film Casablanca, on arrêtera les “suspects habituels”. D’ailleurs le Camp du Bien les a nommément désignés avant le vote de la loi. Tel est le triomphe du droit et la défaite de la justice. Une politique de santé digne de ce nom s’honorerait de rechercher comment faire baisser le nombre d’avortements qui est scandaleusement deux fois plus élevé en France qu’en Allemagne. Cette action courageuse, qui est un vrai service à rendre à nos concitoyens, attendra des jours meilleurs. Ils ne sauraient tarder."

le 25 novembre 2016

le Cardinal André Vingt-Trois, sur radio Notre-Dame

"C'est un projet qui me parait très grave. D'abord en raison de son objet qui est la possibilité de rendre accessible à des femmes en détresse des possibilités de réfléchir et d'être accompagnées dans leur réflexion par rapport à l'avenir de leur grossesse et que c'est un guerre de religion où il est visible que l'objectif est de faire la promotion de l'avortement comme une issue normale d'une grossesse; Si la loi se met à faire la police sur internet il va falloir embaucher 10 000 fonctionnaires (...)
Quelle est l'obsession qui pousse le gouvernement à choisir le point précis de l'avortement comme point d'intervention plutôt que les sites de radicalisation terroriste ?