La Luxure ( Les péchés capitaux - Saison 6)

LUXURE, PROFANATION DU SACRÉ, ENVERS DU PLAISIR

On sait les remontrances souvent entendues contre les chrétiens et l'Eglise sur l'amour, la sexualité, la chasteté et la luxure. « Morbide, répressif, hypocrite, impossible, dépassé, coincé... » La litanie des qualificatifs est longue... Je vous épargne, surtout en ce moment. Nietzsche les résume en 2 mots ; mortel et toxique, le christianisme tue l'amour et le désir, son message est un poison.Parler de la luxure, péché capital est donc très délicat... et nécessaire, comme il est nécessaire de parler de la vertu opposée. C'est pourquoi nous parlerons aujourd'hui de sacré, de plaisir, de pudeur et de chasteté.

Le corps, l'amour humain, l'union de l'homme et de la femme dans le mariage, la sexualité... SACRÉOui. Nous sommes corps et âme. Ce corps est uni à l'âme, image et ressemblance de Dieu...il est habité. Plus encore ; par le baptême, ce corps animé est Temple, maison de Dieu. Ce «droit de propriété et d'occupation» de Dieu sur le chrétien est proclamé à la face du démon ! L'esprit impur est expulsé au baptême, il doit céder la place à l'Esprit Saint. Cette présence se répercute ensuite sur toute la personne. Dans la vie chrétienne, le corps est épiphanie de l'âme - il la manifeste.

La sexualité, notamment le don complet des époux est bonne, vertueuse, et moyennant l'état de grâce, méritoire. Elle est ordonnée à accueillir la vie humaine, et à exprimer l'amour mutuel entre l'homme et la femme dans le mariage. Cet amour est voulu par Dieu comme stable, durable, fécond. Voilà ce que Dieu a fait, a vu, a béni dès l'origine. Voilà ce qu'il fait, ce qu'il voit, ce qu'il bénit pleinement dans les époux et parents chrétiens fidèles.

La sainteté des époux et parents se réalise donc dans et non pas malgré le mariage. Certains ensuite sont appelés, par choix de Dieu, et par réponse libre de leur part, à rester célibataires « en vue du Royaume des cieux » ; conformité plus spéciale au Christ. Donation radicale. C'est la symbolique du cordon et de la ceinture dans l'habit et les ornements des prêtres et religieux. D'autres assument généreusement un célibat de fait pour diverses raisons, ils l'orientent vers le dévouement à de nobles causes. Tout cela est sacré, comme forme vraie de don de soi. C'est à dire la forme la plus haute d'amour qui existe.

Alors, culte du corps, de la sexualité? Non... Honte, mépris, peur ? Non plus. Ni impudicité – ni pudibonderie, 2 excès à éviter. La pudeur, la décence, la chasteté assument, redressent, réordonnent et élèvent le corps, la sexualité, le plaisir et la joie légitime.

Voilà le point de départ de l'éducation du regard intérieur et extérieur, de la pensée, de l'émotion, du sentiment, de la parole, du regard et du sourire, du geste. C'est un travail lent, patient et délicat. Travail décisif, décision importante en particulier chez les enfants, les jeunes. De quoi s'agit-il ?Il faut maîtriser un attrait naturel déterminé et fort du corps et coeur, inscrit dans la nature et  intégrer la sexualité, le plaisir, l'affectivité dans la personnalité, dans l'état de vie où l'on est – avec ses exigences... en bon ordre, et avec l'aide de la grâce.

Où commence la luxure ? La luxure profane ce « sacré spirituel et charnel »,  elle renverse le plaisir en faisant un but et non une aide et lui asservissant l'homme. Comme il est facile d’être trompé par les nombreuses voix qui, dans notre société, défendent une approche permissive de la sexualité, sans prêter attention à la pudeur, au respect de soi et aux valeurs morales qui confèrent aux relations humaines leurs qualités !

Quelles sont ces voix? Idéologie du genre qui dénature et déconstruit – pseudo « éducation affective et sexuelle à l'école », dès le primaire ; en clair, viol des consciences, maltraitance de l'enfance, perte d'innocence, ingérence dans la mission des parents, premiers éducateurs – pseudo liberté et créativité artistique dont le résultat laisserait perplexe les animaux eux-mêmes – industrie et commerce humain de la pornographie, drogue et esclavage – climat de jouissance – et surtout, la grande peur de ne pas être comme tout le monde!

Pourquoi est-ce "capital", la luxure ? Feuilletez l'histoire sainte, elle a ses exemples : David, si juste, et si avancé en sainteté, en vertu... bilan : infidélité, mensonge, abus de pouvoir, meurtre. Les deux anciens accusateurs de Suzanne... bilan : aveuglement du cœur, obscurcissement du jugement, hébétude des sens - puis chantage et menace - mensonge - parjure - meurtre. Songez au nombre de crimes passionnels dans l'histoire... Après la chasteté tombent, bien souvent, la prudence, la force, et la justice.

La chasteté est un don et une lutte. «Vous avez tous une vocation au martyre ; ça ne sera plus le martyre sanglant des premiers chrétiens, ce sera le martyre à contre-courant. Je pense en particulier, précise-t-il aux jeunes, à la difficulté de rester pur.» (St Jean Paul II, JMJ de Sydney). En matière de chasteté (comme dans bien des domaines importants), être dans le vent est une ambition de feuille morte. Et nous savons le devenir des feuilles mortes...

Alors, voici quelques moyens qui ont fait leur preuve. D'abord, arrêtons de « psychologiser » à l'excès. Ni ange ni bête, nous affrontons une certaine révolte des sens contre l'esprit, du corps contre l'âme, des passions et émotions contre la raison et la volonté. Et tous les jours nous réapprenons la maîtrise de soi. Ensuite ayons un discours clair et cohérent. « Oui, l’amour est «extase».. non pas moment d’ivresse, mais chemin allant du je enfermé sur lui-même vers sa libération dans le don de soi Et précisément ainsi vers la découverte de soi-même, plus encore vers la découverte de Dieu». Quant à la sexualité, l'amour véritable « n’est pas le refus de l’eros, ce n’est pas son «empoisonnement», mais sa guérison en vue de sa vraie grandeur. C'est une lente maturité, une purification et cela peut exiger le renoncement... » (Benoit XVI, Deus Caritas est). Soyons exemplaires. Il n'y a pas que le mal qui est contagieux ; le bien aussi ! La chasteté est pour chacun selon son état de vie. C'est possible. Cela rend heureux. Cela libère. Cela encourage.

Humilité, prudence : nos anciens méditaient là-dessus en étudiant le chant 12° de l'Odyssée d'Ulysse – les sirènes. Très instructive leçon! Ne pas s'exposer – ne pas écouter – pratiquer le courage de la fuite – ne pas jouer à Ulysse - Il y a une garde du cœur, des regards, des conversations, des gestes qui est de bon aloi. « Seigneur, rendez-moi chaste... Mais... pas tout de suite ». Saint Augustin a bien résumé le problème. Donc lucidité, fermeté et rapidité dans les occasions, les situations à risque. Il n'y a pas de place ici pour discussion, hésitation et demi mesure. Pas de faux raisonnement non plus : « Pour critiquer, pour condamner, il faut savoir de quoi on parle ! »... Ah bon? Pour condamner le cyanure, faudrait-il savoir le goût que ça a?

Expulser le démon du découragement. Dieu voit dans le cœur le désir de ne pas consentir à la tentation – et les actes posés en ce sens. Consentir d'avance non à la faute, mais à sa fragilité. Ne pas se laisser écraser, paralyser par la honte après la chute. Regretter fermement, avouer entièrement dans la confession, réparer généreusement, repartir humblement.

Méditons la passion et la croix, en particulier la 10° station, Jésus dépouillé de ses vêtements. Jésus paie de ce dépouillement notre pudeur, notre chasteté et le vêtement de grâce de nos âmes. Regardons aussi Notre Dame et Saint Joseph. « Vierge unique, douce entre toutes, quand nous serons délivrés de nos fautes, faites-nous purs et doux ». Regardons notre destinée ultime dans la foi. Méditons les fins dernières, le ciel et l'enfer - pour le corps et pour âme. L'ascèse corporelle, la pénitence, la maitrise de soi, la chasteté et la pureté sont éclairées d'en haut par cette finalité ultime. Au ciel, infiniment et indéfiniment, « le cœur et le corps exsulteront dans le Dieu vivant ».

Pas d'obsession en matière de chasteté et de luxure. Il y a une douceur, fille de pureté et de chasteté, résultat de la force, d'un certain combat consenti dans la paix. Une certaine béatitude évangélique qui fait « posséder » assez la terre du corps et des désirs sensibles, pour les garder dans l'ordre. « Bienheureux les doux, car ils possèderont la terre ». Acceptons enfin, de la part de Dieu, de nos supérieurs, de nos frères, bienveillance, encouragement mais aussi vérité et exigence à ce sujet.

Debout les hommes, debout les femmes !

« Ne savez-vous pas que vous êtes le Temple du Saint Esprit ?

Vous êtes rachetés à grand prix, glorifiez et portez Dieu en vos corps »

Abbé Garnier - 24 Mars 2019