Conte chrétien : Le berceau de Jésus ou le dernier songe de Joseph
« L’enfant qui grandit en Marie, est l’œuvre de l’Esprit Saint ; tu l’appelleras Jésus sauveur » Tel fut le message du premier songe de Joseph. Et peut-on mettre en doute la parole d’un ange, même s’il apparaît dans un rêve ? Alors Joseph prit Marie chez lui. À Nazareth on le nommait Joseph le juste.
C’est qu’il s’y entendait pour AJUSTER les poutres, les solives, les planches, étant menuisier artisan charpentier... Mais il pratiquait surtout la justice du cœur, celle qui ne se mesure pas et que l’on nomme compassion, aumône, miséricorde.
Ce n’était pas un bavard, Joseph, on n’a pas une seule parole de lui dans
tout l’Evangile... Non il ne causait pas, il écoutait, regardait, réfléchissait,
évaluait, décidait en s’ajustant au bon vouloir de Dieu, aux personnes
rencontrées, aux évènements, à leurs circonstances. .
Joseph prit donc Marie dans sa maison à Nazareth, mais alors quel
remue-ménage ! En premier lieu il fallait préparer une chambre pour
Marie et l’enfant qui allait naître, refaire le dallage, rénover les boiseries,
les meubles, les tapisseries : tout devait être propre, digne, accueillant dans
la simplicité. .
Et puis il y avait le berceau ! Joseph prit une journée pour y penser,
car les meubles, les planches, les portes, c’était son travail habituel, mais
un berceau... et pour qui... cela demande réflexion. .
Peu a peu, un plan s’élabora dans sa tête : il choisit des bois différents
les uns des autres par leur dureté, leur souplesse, leur résistance, leur odeur,
et, dans ses mains habiles, les outils se mirent à danser, à sautiller, à aller et
venir, courir, crier, chanter...Scies, râpes, rabots, gouges, ciseaux, tarières,
chacun laissait sa trace dans le bois, et laissait des copeaux sur le vieil établi. .
Tenons, mortaises et chevilles s’ingénièrent à rassembler le tout harmonieusement.
Poncé, verni, spacieux, équilibré, stable et léger, ce berceau
était une oeuvre d’art. Quand Joseph le présenta a Marie elle s’extasia :
« Comme il est beau son berceau ! Je vais l’habiller a l’intérieur d’ouate,
de coussins, de couvertures légères. Notre enfant y reposera en faisant des
rêves merveilleux. Merci Joseph » .
Ni l’un ni l’autre ne savait ce qui les attendait. .
À midi, coup de trompette, galop de cheval dans la rue. Un officier
romain proclame : « Avis à la population... » Et une affiche fut placardée
contre la porte du gouverneur : « Tous les habitants de l’empire doivent se
faire inscrire sur un registre de la ville où sont nés ses ancêtres .» .
Et Joseph se prépara à prendre la route. Marie lui dit : « Je pars avec
toi. » On prépara quelques affaires : linge, couvertures, ravitaillement, on
équipa l’âne d’un double bât, et, dès l’aube, ce fut le début d’un long
voyage : plus de 100 km à travers la Galilée, la Samarie, la Judée. L’âne les
aidait beaucoup et parfois portait Marie très fatiguée. Arrivés a Bethléem,
pas de place pour eux a l’auberge !... par bonheur ce sont les pauvres
bergers qui les accueillent... Dans la nuit, Marie met au monde Jésus,
l’enveloppe de couvertures et le couche sur la paille dans une mangeoire
à bestiaux. Et Joseph pensait : .
« À Nazareth, nous avions un si beau berceau ! » .
Puis ce fut le joyeux défilé des bergers qui dansaient et chantaient avec
les anges... .
Et puis la caravane des Mages... .
Mais dans la nuit, Joseph sentit qu’on le secouait, c’était l’ange. « Debout
Joseph ! Hérode veut faire assassiner l’enfant... alors prends Jésus et sa
mère et fuyez en Égypte... départ immédiat, direction plein ouest. L’âne
vous guidera. » .
On attache avec ses langes l’enfant Jésus sur le dos de l’âne, on réunit
quelques provisions, et c’est une longue marche, sous le soleil, en direction
de la mer, du Sinaï, du Nil, des pyramides... Pendant des années ils vécurent
en exilés, dans des abris de fortune, Joseph faisant des petits boulots, avec
Marie regardant Jésus et rêvant : « Tout de même, nous avions un si beau
berceau pour lui ! » .
Enfin une nuit, une petite tape sur l’épaule réveilla Joseph... c’était l’ange.
« Les tyrans qui voulaient tuer Jésus sont morts. Vous pouvez rentrer à
Nazareth. » Ce fut le troisième songe de Joseph, plein d’espérance.
Et la caravane reprit la piste du bord de mer, l’âne trottinant à côté de Jésus, Marie et Joseph à quelques pas en arrière, surveillant leur trésor. C’est ainsi qu’au bout de huit jours, on arriva en Galilée, a Nazareth. Là, rien n’avait changé : l’atelier de Joseph, les outils, les copeaux, tout était en place.
La chambre de Marie était intacte avec le berceau dans un coin. .
On renoue avec les voisins, les amis, Joseph trouva du travail, et Jésus
grandissait au milieu de nombreux copains. .
Quand il eut 12 ans, toute la famille ainsi que la moitié du village se
mirent en route pour un grand pèlerinage a Jérusalem... et c’est dans le
temple que Jésus dit à ses parents des mots qu’ils n’oublièrent pas : « Je
dois m’occuper du royaume de mon Père. » .
Ils rentrèrent à Nazareth et Joseph, chaque jour jetait un œil au berceau
qu’il avait construit avec amour et ou Jésus n’avait jamais dormi... et Jésus
avec application, apprit le métier d’artisan charpentier, et il se faisait beaucoup
d’amis. Parmi eux il y avait un émigré, Louka, qui se confiait à lui ;
et Jésus parla à Joseph : « Ses parents arrivés depuis peu habitent la petite
maison près de la fontaine, ils sont très pauvres et attendent la naissance
d’un bébé. » Joseph écouta sans dire un mot, mais dans ses yeux brillait
une lumière. Le lendemain le berceau avait changé de domicile. .
Et dans la nuit, Joseph eut un songe, le dernier..., une voix qui n’était
pas celle d’un ange, murmura a son oreille : « Heureux sois-tu Joseph,
de donner aux pauvres ce que tu as de meilleur, de plus précieux, de plus
beau. » .