In memoriam Michele Madiran - Jeanne Smits

Michèle Arfel Madiran a été rappelée à Dieu au matin du 30 juin, sept ans après le décès de son époux, Jean Madiran, qui lui manquait tant. Elle est partie sans bruit au terme d’une longue maladie et de plusieurs semaines d’hospitalisation, vécues dans une grande discrétion : dans cette pudeur qui la caractérisait. Une pudeur de grande dame.

Très entourée pendant les derniers mois et semaines de sa vie, Michèle Madiran a pu recevoir les derniers sacrements. Puis la visite de dom Louis-Marie, le Très Révérend Père Abbé du Barroux, lui a permis de communier dans la maison Jeanne-Garnier à Paris où elle fut accueillie une semaine avant son entrée dans l’au-delà, devenue inéluctable. La médecine se contentait de soulager, s’effaçait devant la maladie victorieuse ; le moine bénédictin apportait des secours de valeur infinie, pour la vie éternelle qu’elle espérait.

Où elle espérait retrouver Jean Madiran…

Elle avait une belle admiration pour Jean Madiran, elle était son soutien et cela se voyait ; que de jolie complicité entre eux deux !

En regardant nos photos d’elle et lui – nous en avons quelques-unes – j’étais saisie par ce regard amoureux, presque un regard de jeune fille, que Michèle Madiran portait sur son écrivain de mari : auteur de combat, catholique des tranchées antimodernistes, homme debout pour défendre Dieu et la France, la plume à la main, jusqu’aux derniers jours de sa longue vie enracinée dans la vérité et l’amour de la patrie.

Il fallait bien un tel homme à Michèle, née en Algérie française, pied-noire passionnée, marquée à jamais par la blessure des terres perdues… Il lui fallait cet homme de foi grave, mais espiègle, aux yeux bleus pétillants, aimant le vin, la chanson, le rire et l’amitié parce que c’est aussi tout cela qui fait l’amour de la France.

Elle était la fille du Dr Legendre, pédiatre : un de ces « colons » aujourd’hui médiatiquement maudits qui vécurent là-bas au service de la population, apportant un bout de Métropole à travers l’éducation, la santé, les routes, les infrastructures, mais aussi la langue française qui lui fut léguée en héritage.

Les Legendre, c’était une lignée d’hommes et de femmes soignants. Michèle avait quatre frères et sœurs : un frère médecin ; elle-même était infirmière-chef spécialisée en neurologie. Derrière la froideur des mots, une femme pleine d’empathie et de ce que j’aurais envie de qualifier de douceur énergique. Toujours là. Toujours prête à aider.

Michèle fut très proche de sa famille par le sang. Mais aussi de sa famille d’adoption, amie de longue date de Jean Madiran : la grande famille de Jean-Claude et Dominique Absil. Les mots que me dit l’une de leurs filles en ces jours tristes de la séparation sont parlants : « C’était une deuxième maman pour nous tous. » « Elle était là quand j’étais malade ; elle était là quand j’accouchais. Nous pouvions toujours compter sur elle. » « Elle faisait partie de nous. »

Elle avait pris sous son aile un petit-fils des Absil, gravement handicapé, parce qu’il était handicapé. Jusqu’à aller, quand les circonstances devenaient trop difficiles, passer des jours et des nuits auprès de lui à l’hôpital. Charité discrète, active, enveloppante, sans l’ombre d’une contrainte.

De Michèle, je garde le souvenir lumineux d'une femme chaleureuse, amicale, droite. Je me souviens de sa voix posée, grave et rassurante. De son accueil si amical, de son humour pince-sans-rire. Du soutien, aussi, qu’elle nous apporta lorsque les choses prirent pour nous un tour difficile à “Présent”, quelques mois après le décès de Jean Madiran…

Beaucoup de prières l’ont accompagnée lors de son grand départ dans l'autre monde, le vrai. Que Dieu daigne l'accueillir et la réunir au plus vite avec ceux qu'elle a tant aimés et qui l’ont précédée là-haut, et qu’Il console ceux, si nombreux, à qui elle manque aujourd’hui.

Jeanne Smits