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mercredi 02 mai 2018

Croyons-nous encore seulement que la vérité existe ?

20180502HommeNouveauCouv1.jpgExtrait de l'éditorial de Philippe Maxence dans l'Homme Nouveau, à propos du discours d'Emmanuel Macron aux Bernardins :

"... Connu comme le pape du ralliement, Léon XIII n’a eu pourtant de cesse (cf. l’encyclique Diuturnum) de dénoncer le « droit nouveau » issu de la modernité et de sa traduction politique qu’est la Révolution française. Parce qu’hégémonique, ce « droit nouveau » a- t-il rendu illégitimes et caduques toute contestation et toute opposition à ce qu’il est et à ce qu’il représente ? À vrai dire, la question n’est même pas posée par les représentants actuels du catholicisme et c’est là tout le problème.
Alors que l’on se gargarise facilement aujourd’hui de paroles et de gestes considérés comme « prophétiques », pourquoi n’entendons-nous toujours pas cette forte parole du pape Léon XIII : « Les théories modernes sur le pouvoir politique ont déjà causé de grands maux, et il est à craindre que ces maux, dans l’avenir n’aillent jusqu’aux pires extrémités. »
Nous y sommes et à plus soif ! D’où la simple question : à quand la réévaluation de notre rapport au « droit nouveau » et à ses conséquences ? À bien considérer, il y a là une tâche bien plus urgente que de recevoir le Président de la République, avec le risque de tomber non seulement dans une action de récupération mais plus encore d’intégration-dilution dans la République idéologique.
Sous prétexte de réalisme, nous ne cessons de redire que nous sommes minoritaires. Et, c’est exact ! Pour autant, ce constat doit-il entraver tout combat en faveur de la vérité ? Et l’idée même de combat ? Croyons-nous encore seulement que la vérité existe et qu’elle n’a rien à voir avec le consensus ? Déjà Péguy pouvait écrire en son temps : « Parce qu’ils n’ont pas le courage temporel, ils croient qu’ils sont entrés dans la pénétration de l’éternel. » Depuis longtemps maintenant, nous sommes en fait des dhimmis de la modernité et de la laïcité. Nous espérons encore ne pas connaître une autre « dhimmitude ». Mais éviter l’une n’empêche nullement de sortir de l’autre."


jeudi 19 avril 2018

Emmanuel Macron aux Bernardins : un discours très ambigu

20180409MacronBernardins2.jpgNous reproduisons ici le commentaire donné par Jean-Pierre Maugendre pour "Renaissance catholique"

Le 9 avril der­nier, le Pré­sident de la Répu­blique a tenu au Col­lège des Ber­nar­dins, devant les évêques de France, un dis­cours très remar­qué. Les catho­liques sont tom­bés sous le charme et les laïcs sous le choc. Cepen­dant ni l'enthousiasme des uns ni les impré­ca­tions des autres ne semblent tota­le­ment jus­ti­fiés.

Un éloge inattendu de l'Église

Notons d'abord qu'Emmanuel Macron n'a pas tari d'éloges sur l'Église et son rôle dans la socié­té fran­çaise, ren­dant en par­ti­cu­lier hom­mage à son action dans la vie asso­cia­tive au ser­vice des plus faibles : « Malades, iso­lés, déclas­sés, vul­né­rables, aban­don­nés, han­di­ca­pés, pri­son­niers ». Le Chef de l'État est allé jusqu'à dres­ser un tableau élo­gieux de la vie contem­pla­tive « vie de prière et de tra­vail ». Le pro­pos est pour le moins inha­bi­tuel même si Nico­las Sar­ko­zy dans son dis­cours du Latran, le 20 décembre 2007, avait déjà rap­pe­lé les racines chré­tiennes de l'Europe, noté la supé­rio­ri­té du curé sur l'instituteur, en appe­lant enfin à une « laï­ci­té posi­tive ». Son suc­ces­seur, de son côté, note oppor­tu­né­ment, au rebours de la vul­gate offi­cielle, que « nous ne sommes pas faits pour un monde qui ne serait tra­ver­sé que de buts maté­ria­listes ».
L'Église est, ain­si, appe­lée à appor­ter sa contri­bu­tion à la « poli­tique contem­po­raine » dont l'urgence est de « retrou­ver son enra­ci­ne­ment dans la ques­tion de l'homme » face à ce qui « grève notre pays (…) le rela­ti­visme et même le nihi­lisme ». Cela au titre de la longue tra­di­tion qu'elle repré­sente, son exper­tise en huma­ni­té aurait dit Paul VI, mais aus­si au regard de son enga­ge­ment huma­ni­taire. Le Pré­sident de la Répu­blique appelle ain­si les catho­liques à s'engager en poli­tique mais en leur rap­pe­lant que la voix de l'Église « ne peut être injonc­tive », elle ne peut être que « ques­tion­nante ». Et pour que les choses soient claires, il conclut son inter­ven­tion par une for­mule dont la sèche­resse contraste avec l'empathie des pro­pos anté­rieurs : « Je deman­de­rai (à chaque citoyen) de la même façon et tou­jours de res­pec­ter abso­lu­ment et sans com­pro­mis aucun toutes les lois de la Répu­blique. C'est cela la laï­ci­té, ni plus ni moins, une règle d'airain pour notre vivre-ensemble qui ne souffre aucun com­pro­mis, une liber­té de conscience abso­lue ».

Un raisonnement confus

Tout cela appa­raît à la fois inco­hé­rent et confus. En effet, com­ment conci­lier la lutte contre le rela­ti­visme et le nihi­lisme avec l'absolu res­pect de la loi répu­bli­caine qui est, par nature, évo­lu­tive et rela­ti­viste, puisqu'elle n'est que le fruit des rap­ports de force élec­to­raux d'un ins­tant. L'évolution de la légis­la­tion sur l'avortement, ces qua­rante der­nières années, est un exemple aveu­glant du rela­ti­visme ain­si induit par le pri­mat abso­lu de la loi posi­tive, consi­dé­rée comme contrai­gnante et obli­ga­toire si elle a été éla­bo­rée selon le pro­ces­sus juri­dique appro­prié. Selon la date (avant 1975 ; entre 1975 et 2001 ; après 2001), l'avortement consti­tue un crime : dès la concep­tion, à par­tir de 10 semaines ou à par­tir de 12 semaines, sauf si, bien sûr il s'agit d'une Inter­rup­tion Médi­cale de Gros­sesse, alors légale jusqu'à l'accouchement. À aucun ins­tant, Emma­nuel Macron n'emploie les mots au rebours du rela­ti­visme que sont : bien, mal, vrai, faux, beau, laid, etc.
Au début de son inter­ven­tion, le Pré­sident de la Répu­blique observe que « le lien entre l'Église et l'État s'est abî­mé ». Aucun fait n'est avan­cé pour étayer ce constat qui serait la consé­quence du fait que « pen­dant (plu­sieurs années) les poli­tiques ont mécon­nu les catho­liques de France » : cer­tains, les exploi­tant élec­to­ra­le­ment, d'autres les ostra­ci­sant comme « mino­ri­té mili­tante contra­riant l'unanimisme répu­bli­cain ». L'un des pro­blèmes cen­traux que pose le pro­pos pré­si­den­tiel est qu'il donne l'impression que les trois mots : France, Répu­blique et État sont par­fai­te­ment équi­va­lents et inter­chan­geables. Or ce n'est pas du tout le cas. La France et l'Église ont mille cinq cents ans d'Histoire com­mune. L'État s'est peu à peu mis en place, en par­tie au détri­ment du rôle de l'Église et le moins que l'on puisse dire est que les rela­tions entre l'Église et la Répu­blique sont, depuis l'origine, pla­cées sous le signe de la vio­lence et de la per­sé­cu­tion : des mas­sacres de Sep­tembre aux expul­sions des reli­gieux à par­tir de 1879, en pas­sant par les Guerres de Ven­dée et la Grande Ter­reur. Quand Emma­nuel Macron inter­pelle les évêques de France : « Ne renon­cez pas à la Répu­blique que vous avez si for­te­ment contri­bué à for­ger », on se demande s'il a toute sa rai­son.

Les raisons d'une opération de séduction

L'opération de séduc­tion du Pré­sident de la Répu­blique vis-à-vis des catho­liques est peut-être sin­cère. Dieu seul sonde les reins et les cœurs ! Néan­moins, on peut obser­ver deux faits. Chaque chré­tien, en réci­tant la prière que le Christ lui-même nous a ensei­gnée, demande : « Que votre volon­té (celle du Père) soit faite sur la terre comme au ciel ». Or, ce n'est pas ain­si qu'Emmanuel Macron voit les choses. Ce qui le satis­fait, c'est la col­la­bo­ra­tion huma­ni­taire de ce qu'Alain Besan­çon a récem­ment défi­ni comme « un catho­li­cisme athée ».
Aujourd'hui, la dif­fi­cul­té majeure à laquelle est confron­té notre pays n'est pas liée au catho­li­cisme mais à l'Islam en pleine radi­ca­li­sa­tion et expan­sion numé­rique. Face à ce défi, l'échec de la laï­ci­té est fla­grant. Un peu tar­di­ve­ment, cha­cun redé­couvre la per­ti­nence de la Lettre de Saint-Exu­pé­ry au géné­ral X : « Ah ! Géné­ral, il n'y a qu'un pro­blème, un seul de par le monde. Rendre aux hommes une signi­fi­ca­tion spi­ri­tuelle, des inquié­tudes spi­ri­tuelles, faire pleu­voir sur eux quelque chose qui res­semble à un chant gré­go­rien. On ne peut vivre de fri­gi­daires, de poli­tique, de bilans et de mots croi­sés, voyez-vous ! » Emma­nuel Macron semble conscient de cette réa­li­té. Il sou­haite sans doute que l'Église de France insuffle une part de spi­ri­tua­li­té et de sens du ser­vice gra­tuit dans une socié­té ron­gée par le maté­ria­lisme et l'individualisme. Mais en met­tant le Christ et les Com­man­de­ments de Dieu de côté. On com­prend que nos évêques et le public des Ber­nar­dins se soient enthou­sias­més pour un dis­cours qui ces­sait de consi­dé­rer l'Église comme un enne­mi ou un adver­saire. Qui recon­nais­sait la légi­ti­mi­té de sa pré­sence dans le siècle. Il serait néces­saire qu'ils ouvrent les yeux sur le fait que, ce à quoi la bien­veillance du Pré­sident de la Répu­blique les invite, c'est à renon­cer à la mis­sion à laquelle ils ont été appe­lés.

Jean-Pierre Mau­gendre


vendredi 25 novembre 2016

Les droits de l'homme contre la liberté

Dans un essai percutant intitulé "Les droits de l'homme contre le peuple" le Pr Jean-Louis Harouel explique comment, transformés en religion, les Droits de l’homme sont devenus une arme de destruction des nations occidentales.

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mardi 08 novembre 2016

Cardinal Sarah : "Vous êtes envahis, par d’autres cultures, d’autres peuples, qui vont progressivement vous dominer"

Le Cardinal Sarah, qui vient de publier « La Force du silence » aux éditions Fayard, était en France pour quelques jours.

Il a été interviewé par Boulevard Voltaire.


Mgr Robert Sarah : « J’ai peur que l’Occident... by bvoltaire

Votre éminence, vous venez d’écrire un livre qui s’appelle « La force du silence ». On vit aujourd’hui dans un monde qui a peur du silence, qui le considère comme une source d’angoisse. Comment trouve-t-on le silence, et pourquoi est-il important ?
Je crois que le silence est vital. Ne serait-ce que pour retrouver une certaine sérénité ; le repos du corps. Par exemple quand vous voulez dormir, vous avez besoin de silence autour de vous. Vous voulez écouter une belle musique, vous avez besoin de silence autour de vous. Vous voulez lire un livre intéressant, vous avez besoin de silence. Vous voulez causer avec un ami, sur des questions sérieuses, vous voyez bien que le silence est vital. Et même pour se regarder soi-même, pour savoir qui nous sommes, où nous allons, ce que nous voulons faire. On a besoin de silence, vraiment, pour que l’homme s’intériorise, que l’homme aille à la source de son être.
S’il est totalement enveloppé de bruit, torturé par le bruit, il n’est pas tranquille, il ne peut pas réfléchir, il ne peut pas savoir où il va, ce qu’il fait. Et donc il s’éloigne de lui, il s’éloigne de Dieu. Parce que Dieu est silencieux. Pas un silence qui est absence de parole, parce qu’il y a aussi un silence qui parle.
20161108CardinalSarah.jpg
Voyez-vous, le silence n’est pas seulement le fait de ne pas entendre de sons. Le silence c’est aussi un langage. C’est le langage de Dieu, d’ailleurs. Et donc j’invite tout le monde à retrouver ce silence-là pour se retrouver en tant qu’humain d’abord. Mais également pour que les hommes puissent quand même s’asseoir pour réfléchir aux vraies questions de la vie. Les vraies questions de la vie ne sont pas seulement les questions économiques, les questions techniques. Mais « qu’est-ce l’homme ? », « pourquoi est-il sur cette terre ? », « où va-t-il ? », ce sont des questions importantes, n’est-ce pas? Et tout cela va déterminer l’économie, la politique, les relations humaines. Donc je pense que ce texte « La force du silence » est très important. Certes, c’est un problème difficile, incompréhensible. Les gens sont comme traumatisés, ils me demandent « mais qu’est-ce que ça veut dire, ce silence ? », « pourquoi rechercher le silence ? ». Et pourtant, comme je disais, c’est absolument indispensable, urgent, de retrouver le silence, pour que l’homme se retrouve lui-même et retrouve Dieu.
Alors justement, on est dans un monde difficile aujourd’hui, et beaucoup dénoncent surtout le silence de Dieu. Vous êtes un homme d’église. Où est Dieu, dans ce silence, justement ?
Dieu est présent dans notre monde. C’est nous qui ne l’écoutons pas. C’est nous qui ne voulons pas le voir. Mais il est pleinement présent. Il est présent là où l’on souffre. Parce que la première victime de la souffrance, c’est Dieu. Il ne veut pas le mal. Mais c’est nous qui créons le mal. C’est nous qui créons les guerres, voyez-vous, c’est pas Dieu. Et quand on tue des enfants, il ne faut pas dire « mais pourquoi Dieu permet-il ça ? ». C’est nous qui voulons ça, mais pas Dieu. Et Dieu souffle péniblement de voir des enfants qu’on tue, des innocents qu’on tue.
Donc, il n’est pas silencieux mais il a Sa façon d’être présent. Une présence qui devrait nous amener à réfléchir. Pourquoi la guerre ? Que voulons-nous avec la guerre ? Que voulons-nous à détruire des gens, des personnes, et ce qu’ils ont acquis par des années de travail ? Et donc Dieu est silencieux mais c’est un silence qui interroge l’homme sur son action. Qui interroge l’homme sur le vrai sens de la vie.

On vous sent inquiet pour le monde occidental. Qu’est-ce qui vous inquiète ?
Vous savez, la plus grande inquiétude c’est que l’Europe a perdu le sens de ses origines. Elle a perdu ses racines. Or, un arbre qui n’a pas de racines, il meurt. Et j’ai peur que l’occident meure. Il y a beaucoup de signes. Plus de natalité. Et vous êtes envahis, quand même, par d’autres cultures, d’autres peuples, qui vont progressivement vous dominer en nombre et changer totalement votre culture, vos convictions, vos valeurs. Il y a également, voyez-vous, cette angoisse, qu’il n’y a que la technique, que l’argent qui compte. Il n’y a pas d’autre valeur…

Et vous êtes aussi celui qui espère parce que la foi n’est pas morte en France. Vous étiez il y a quelques jours dans une basilique de Vézelay pleine. Aujourd’hui dans une cathédrale de Versailles pleine. Qu’avez-vous à dire à ces gens qui ont la foi ?
La consolider ! La renforcer ! Qu’elle soit plus dynamique, qu’elle soit plus rayonnante ! Pour qu’avec la foi on retrouve Dieu, et en retrouvant Dieu on retrouve certaines orientations, certaines lois, certaines valeurs chrétiennes.